Camille Roy (IV)

Le 11 juin 1918 décédait, à Saint-Jean-Deschaillons, le plus sympathique et le dernier survivant des poètes de l'école de 1860, Pamphile Le May. Trois jours après le 14 juin, au cours d'une matinée de printemps fleuri, l'on déposait au cimetière du village les restes du vieux barde. A quatre-vingt-un ans et cinq mois, le poète reposait enfin dans cette terre de Lotbinière qu'il avait si fidèlement aimée, dans ce coin de province dont il avait chanté la douceur et les rustiques plaisirs.

Aussi bien, est-ce un long poème qu'il faut écrire pour chanter tout le Canada. Il y a ici, sur cette terre que nous aimons, des fleuves, des bois, des montagnes. des horizons que la nature a faits larges et merveilleux ; mais il y a aussi des traces profondes d'une histoire que nos pères ont faite héroïque. Et le Canada chanté doit contenir à la fois les grands spectacles de la nature, et les actions de l'âme canadienne.

Et les autres? Les trois cent mille qui vivent dans l'Ontario? Les deux cent mille qui vivent en Acadie, dans les provinces maritimes? Les cent cinquante mille qui vivent dans l'Ouest? Quel avenir est le leur ? Quelles chances ont-ils de vaincre la mort par la vie, de maintenir par tout le Canada ces réserves de vie française qu'ils ont mission d'y conserver ?

Peut-être avez-vous eu d'abord la pensée de me poser avec quelque malice une question préalable: que faut-il penser de cette grande minorité canadienne, de cette imprudente majorité provinciale, qu'est la population française de la province de Québec ?