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3.84/5 (sur 56 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Camille Teste est militante féministe et professeure de yoga.

Diplômée d'un Master II Communication de Sciences Po Paris (2014-2016), elle change de vie et devient professeure de yoga en 2019.

Ancienne journaliste spécialisée dans les enjeux de justice sociale, toujours aussi engagée, elle se propose d’allier le militantisme avec le "bien-être".

Camille Teste se fait connaître grâce à son compte instagram @camille_teste. Sur celui-ci, elle partage des réflexions politiques autour du corps, des émotions et des rapports de domination, sur un ton qui mêle humour et philosophie.

Elle est créatrice de Circé, qui propose des retraites de yoga et événements féministes, engagés pour des corps libres, et contre toute forme d'oppression.

Twitter : https://twitter.com/kamilleteste?lang=fr

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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Parce que j'avais un filet de sécurité [...] j'ai changé de voie
Je suis devenue professeure de yoga pour explorer autre chose : la possibilité d'être un corps, de l'habiter, de travailler avec lui et non contre lui. [...]
Mais en intégrant cet univers, j'ai découvert une culture qui était pas du tout raccord avec ma façon de voir le monde. Dans le milieu du bien-être il est d'usage de promettre aux gens de grandes choses : une meilleure vie, un équilibre psychologique, corporel et spirituel, bref, le bonheur. Pour atteindre ces états complexes, don on cherche pourtant le chemin depuis l'antiquité, il suffirait de s'auto-optimiser, grâce à des pratiques allant de la nutrition au fitness en passant par la méditation, le développement personnel, les soins esthétiques, le coaching et une multitude de pratiques aux accents New-Age. Cette logique de perfectionnement continu qui implique de consommer toujours plus, est une aubaine pour le capitalisme. Par ailleurs, ces pratiques individuelles, souvent présentées comme des solutions aux problèmes collectifs, nourrissent une logique de petits gestes, idéale pour ne surtout rien changer.
Enfin, il ne m'a pas fallu longtemps pour réaliser qu'outre les abus et autres dérives sectaires présentes dans ce secteur, les pratiques, outils et espace de bien-être volontiers présentés comme des solutions destinées à toustes, étaient surtout structurés pour convenir à des personnes jeunes, riches, blanches, minces et valides.
pp. 14-15
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7. « Récemment, je suis tombée sur la vidéo d'une youtubeuse réac – dont je ne crois pas essentiel de vous donner le nom. Elle y dit : "Une civilisation avancée, c'est une civilisation où les gens ne portent pas de jogging dans la rue." J'ai eu de la peine pour elle. Outre le classisme de cette phrase, cette remarque dit beaucoup de la façon dont une certaine frange de la population habite son corps. Ou plutôt, ne l'habite pas. Et si nous étions toustes en jogging dans la rue ? Qu'est-ce que cela donnerait ?
Peut-être que nous danserions sur les quais du métro. Peut-être grimperions-nous aux arbres des parcs municipaux. Et, plutôt que d'essayer de cacher tout ce qui fait de nous des corps vivants – nos poils, nos formes, nos rides et nos douleurs – peut-être que nous trouverions le moyen d'en profiter.
En remettant nos corps au centre, peut-être que l'on considérerait davantage le corps des autres. Alors, peut-être concevrait-on les villes pour que tous les corps puissent en jouir. À la tête de nos États, peut-être qu'on aurait des êtres capables de penser les réalités corporelles d'autrui, et non des individus trouvant judicieux de reculer l'âge du départ à la retraite pour ajouter plusieurs années de souffrances à des corps déjà exsangues. » (pp. 148-149)
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Nous sommes sociabilisé.e.s à ignorer, mépriser ou au mieux à tolérer tout ce qui touche à la vulnérabilité et aux besoins particuliers des autres, encore plus lorsque ceux-là relèvent du tabou. Mais nous pourrions tout à fait nous re-sociabiliser à éprouver du plaisir dans les actes du care les plus anodins. Demain, peut-être que nous adapter aux besoins des autres dans les espaces de bien-être nous procurera autant de joie que l'acte de bien-être en lui-même.
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En remettant nos corps au centre, peut-être que l'on considérerait davantage le corps des autres. Alors, peut- être concevrait on les villes pour que tous les corps puissent en jouir. A la tête de nos Etats, peut-être qu'on aurait des êtres capables de penser les réalités corporelles d'autrui, et non des individus trouvant judicieux de reculer l'âge du départ à la retraite pour ajouter plusieurs années de souffrances à des corps déjà exsangues.
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6. « […] Comme l'explique l'anthropologue Jérémie Piolat dans son livre _Portrait du colonialiste_, ces pratiques ancestrales et vernaculaires ont bien existé dans les cultures occidentales. Et si elles se sont perdues, ce n'est pas par hasard : nous y avons renoncé, car rompre avec notre ancestralité nous a permis de nous ériger en figure de la modernité et de justifier, du même coup, notre légitimité à dominer le reste du monde. Mais cette rupture ne nous a pas laissé.es indemnes : elle a fait de nous des êtres "tissés de manques". […]
Là se trouve à mon sens la clé de notre problème : dans une culture occidentale qui a fait de la rationalité son alpha et son oméga, il nous est difficile d'assumer les chemins sinueux et non scientifiquement prouvés que nous empruntons parfois pour aller mieux. Alors, l'une des stratégies que nous adoptons est de nous dissimuler derrière les sagesses et les spiritualités d'autres cultures, dont on considère, au fond, qu'elles sont extérieures à la modernité. En fait, nous leur déléguons, dans une sorte de condescendance un peu raciste, la charge de l'irrationnel. » (pp. 119-120)
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Nous aurions tout intérêt à opter pour des pratiques qui nous permettent de résister au système en nous y "désadaptant". Je m'explique : depuis l'enfance, nous intégrons, dans nos corps, des logiques et des fonctionnements qui nous permettent de nous adapter aux modes de vie contemporains. Ainsi, dès l'école maternelle, nous apprenons à nous lever très tôt et à demeurer assis.es des heures durant, au mépris de nos besoins physiologiques les plus primaires. Peu à peu, nous apprenons à nos corps l'efficacité et la performance. Le repos devient de la fainéantise, et l'oisiveté, une tare morale. En parallèle, nous apprenons à faire taire nos émotions, à nous tenir à distance de nos paysages intérieurs, à ne plus vivre nos corps autrement que comme des objets servant à produire, à décorer ou à dominer. Bref, nous nous désincarnons.
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Dans le milieu du bien-être, il est d’usage de promettre aux gens de grandes choses : une meilleure vie, un équilibre psychologique, corporel et spirituel, bref, le bonheur. Pour atteindre ces états complexes, dont on cherche pourtant le chemin depuis l’Antiquité, il suffirait de s’auto-optimiser, grâce à des pratiques allant de la nutrition au fitness, en passant par la méditation, le développement personnel, les soins esthétiques, le coaching et une multitude de pratiques aux accents new Age. Cette logique de perfectionnement continu, qui implique de consommer toujours plus, est une aubaine pour le capitalisme,
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5. « […] le monde du bien-être devrait aussi prendre la mesure d'une autre dynamique, courante dans ses espaces : l'appropriation culturelle. […]
Symptomatique d'une postmodernité occidentale où traditions et cultures locales sont balayées pour laisser place à une sorte de grand gloubi-boulga mondialisé, cette façon de picorer dans les pratiques des autres n'est pas neutre. Elle est au contraire le fruit d'une longue histoire coloniale qui se traduit, aujourd'hui encore, par une certaine facilité à aller nous servir dans la culture d'autrui, dès lors que nous en éprouvons le besoin. Dans une relation d'égalité, cela ne serait sans doute pas grave. On y verrait un phénomène d'hybridation, poétique et fructueux pour les deux parties. Mais nous ne sommes pas dans une situation d'égalité : la plupart des cultures que nous "apprécions" n'ont ni le choix ni la possibilité de faire à nos cultures ce que nous faisons aux leurs.
Alors que leur fait-on, à ces cultures, qui puisse être qualifiable d'appropriation ? D'abord, nous en tirons des profits dont non seulement les premier.es concerné.es ne bénéficient pas en retour, mais dont, souvent, iels pâtissent.
[…]
Sans aller forcément jusqu'à l'anéantissement, l'appropriation culturelle implique un processus de transformation inévitable, sur lequel les premier.es concerné.es n'ont aucun droit de regard, tant le rapport de force est en leur défaveur. » (pp. 112-113)
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1. « […] le terme "bien-être", aujourd'hui dévoyé et dépolitisé, a longtemps été une expression très politique, qu'on retrouve, par exemple, dans le premier slogan de la CGT, syndicat de travailleureuses qui revendiquait, lors de sa création en 1895, trois valeurs cardinales : le bien-être, la liberté et la solidarité. Dans les années 2020, au contraire, s'offrir une pause bien-être revient, dans la tête de beaucoup de personnes, à s'extraire des problèmes du monde le temps d'une méditation ou d'un cours de fitness. Sauf que dans les faits, ce n'est pas du tout ce qui se passe : on ne s'extrait pas des problèmes du monde, ils nous traversent à chaque instant. Ainsi, dans le bien-être comme ailleurs, les normes dominantes, qui créent et entretiennent les inégalités, tendent à se renforcer. Dans le bien-être comme ailleurs, l'idéologie individualiste et néolibérale, qui affaiblit toujours plus le collectif et isole toujours plus les individus, tend à s'intensifier. Comme le reste de la société, le monde du bien-être est un espace traversé par une multitude d'enjeux très politiques, auxquels nous participons dès lors que nous fréquentons ces espaces. Que l'on se considère apolitique ou non. » (pp. 15-16)
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2. « Or, bien plus que la place des pratiques spirituelles dans la lutte, c'est cette vision sacrificielle de l'engagement qui pourrait être un frein aux luttes militantes. Penser que les pratiques de bien-être seraient forcément une perte de temps ou que les militant.es devraient tout sacrifier à la lutte me paraît incompatible avec l'horizon d'émancipation que porte le projet progressiste. C'est pourquoi il me semble essentiel de déconstruire et de dépasser cette vision "productiviste" du militantisme, et de se poser la question de la place de la vulnérabilité dans les luttes collectives.
[…]
Cette tentation de la lutte incessante ne ressemble-t-elle pas à la très libérale 'Grind culture' (ou 'Hustle culture') des cadres dynamiques et autres adeptes du 'Work hard, play hard', dans laquelle être surmené.e est le summum du cool du respectable ? Et où, surtout, ne pas l'être paraît suspect. Alors, comment expliquer que des personnes souvent rompues aux luttes anti-capitalistes fonctionnent selon les modalités mêmes du système qu'elles combattent ? » (pp. 62-63)
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