Carl Spitteler

Un livre étrange, à la fois philosophique, psychologique, métaphysique...enfin un véritable voyage dans le tréfonds de l'homme. Mais ici, avec Victor, notre héros, le tréfonds remonte à la surface, il l'absorbe, l'enivre, l'amibe en même temps, et s'en va troubler la réalité...c'est le déséquilibre. L'écriture n'est pas aussi hermétique que ça, elle est très abordable, l'auteur nous fait vivre l'obsession de Victor d'un amoureux malheureux qui multiple des astuces pour reconquérir sa Theuda bien-aimée mais qui, dans le monde de son tréfonds, devient Imago, et ceci dans une ambiance d'un humour caustique. Au fur et à mesure, on finit par s'attacher à Victor, à appréhender sa folie et tous ces fantômes qui se déchirent au dedans de lui!

J'ai aimé ce petit voyage peu ordinaire!

Comment résumer ce pavé ? Le "résumé éditeur", particulièrement abscons, est plutôt de nature à décourager la lectrice.

Et c'est vrai, si on s'attache au symbolisme de l’œuvre, on a affaire à un fatras métaphysique bourré de références, et totalement inaccessible aux âmes simples.

Et pourtant.

Pourtant on peut également balayer la métaphysique, et lire Prométhée et Épiméthée comme un conte de fées enchanteur pour adultes. Tous les critères sont remplis : héros et épreuves à surmonter, figures mythologiques, animaux qui parlent.

Épiméthée s'est vu confier les enfants de Dieu en échange de la royauté, mais ce grand naïf échouera lamentablement à les protéger.

Prométhée est l'archétype du héros bougon et misanthrope, au début jaloux de son frère le roi Épiméthée, mais farouchement attaché à sa propre liberté.

Et encore, je ne vous ai pas parlé pas de la baleine invisible... ni de la Conscience qui ne sait dire que oui ou non (et seulement quand elle est décidée).

Il y a de la poésie, du lyrisme et de l'humour dans cette œuvre inclassable. Une découverte surprenante.

Traduction au charme suranné de Charles Baudouin.

Challenge Nobel

Challenge Globe-trotter (Suisse)

J’aurais presque envie de classer ce livre sur mon étagère (bien courte) consacrée au théâtre. Unité de temps, de lieu (presque), d’action. Mais surtout, le plus important, l’écriture de Spitteler, faite de nombreux dialogues et quelques descriptions qui ressemblent à des didascalies tant elles sont fonctionnelles et semblent donner les indications nécessaires pour organiser une scène de théâtre et y faire évoluer les quelques personnages de ce drame.

Car il s’agit bien d’un drame. Un lieutenant fraîchement revenu de son service militaire aspire à être traité comme l’adulte qu’il est devenu et à être associé à la gestion de l’affaire familiale, l’auberge du Paon. Mais son père n’a aucune intention de partager son pouvoir, et l’atmosphère familiale est lourde de rancœurs dites ou non dites.

On entend souvent que la crise d’adolescence est un phénomène récent, celui de sociétés occidentales qui peuvent se payer le luxe de ces incartades. Ce livre, même s’il n’est pas si vieux que cela puisqu’il a été publié en 1898, montre qu’il n’en est rien, et que, à défaut de savoir si c’est un mal occidental, il semble que ce soit un mal ancien. Certes, le Lieutenant Conrad a bien 25 ans, mais c’est bien d’une crise d’adolescence qu’il s’agit. Vouloir être traité en adulte, en personne responsable, trouver sa place par rapport aux générations d’avant, savoir comment se positionner par rapport à l’héritage venu de ses parents, voilà les questions qui animent le lieutenant Conrad même s’il ne les formule pas ainsi. Certes, la figure paternelle ne rend pas ses interrogations moins amères, et, même si le livre se centre surtout sur le personnage éponyme, on sent bien que le père, soit parce qu’il se voit décliner soit parce qu’il est poussé par ce fils qui conteste son autorité jusque-là absolue, s’accroche à ses prérogatives comme une façon de refuser l’inéluctable de la vieillesse et du passage de relais en générations.

Ce drame familial se passe dans les verts alpages suisses, mais le paysage vivifiant est bien peu présent, et ne sert en rien à alléger l’atmosphère lourde qui pèse sur le lecteur tout au long de ce court roman. Rien de bien nouveau dans ce roman, et ce n’est peut-être pas pour rien que cet auteur est peu traduit en français, mais ce fut une lecture plaisante et assez rapide pour que je ne me lasse pas du style. Une lecture qui me permettra de briller lors de la prochaine discussion sur l’adolescence dans un dîner mondain en citant un obscur prix Nobel (« Comment, vous ne connaissez pas ? »), mais qui ne me laissera pas un souvenir indélébile (à moins que je ne me mette à fréquenter les dîners mondains…).

Carl Spitteler décrit avec humour et lucidité les affres d'un amour malheureux. Après de longues années d'exil volontaire, le héros rentre au pays natal. Dans sa tête, la femme qu'il a aimée et idéalisée. Mais les choses ont changé : elle est mariée, mère de famille et ne désire rien de plus. Lui refuse de s'en rendre compte. Ce sont alors les tourments d'une impossible passion et la douleur du renoncement.

A noter l'aspect psychanalytique : Imago comme concept théorique désigne la survivance imaginaire d'un participant de la situation familiale infantile, "un schème imaginaire acquis à travers quoi le sujet vise autrui".

"Le lieutenant Conrad", écrit en 1898, est un court roman dramatique de Carl Spitteler, écrivain Suisse de langue allemande, prix Nobel de Littérature 1919. Le drame se déroule en huis-clos entre un fils, fringant lieutenant, impatient d'être reconnu pour sa valeur, et son père, aubergiste respecté mais vieillissant. Autour d'eux, les figures féminines, soeur, servantes, mère, vieilles tantes et potentielles fiancées essaient d'enrayer le drame mais l'attisent également presque malgré elles quand la jalousie s'en mêle. Le caractère de chacun des protagoniste est très bien rendu. La violence des sentiments et des émotions entraînent le lecteur comme dans un tourbillon insensé vers le drame final.

"Imago", écrit en 1906, est un roman de Carl Spitteler, écrivain Suisse de langue allemande, prix Nobel de Littérature 1919. Je n'ai pas aimé ce roman car trop exalté, trop romantique, bien loin de la simplicité dramatique du roman "Le Lieutenant Conrad" du même auteur.



Le narrateur, un jeune écrivain, poète, en devenir, est amoureux fou d'une femme mariée qu'il avait fréquentée quelque temps auparavant. Lui-même avait renoncé à son envie de l'épouser à cause de "sa Muse" qui l'invitait à renoncer à cet amour, et la vie bourgeoise, familiale et étriquée qui s'en suivrait, pour un bien plus prometteur, la renommée et le succès.



On suit Victor, le narrateur, dans ses luttes et ses tourments. Malgré quelques dialogues ciselés et quelques traits d'humour, tout cela m'a paru très fastidieux et peu rationnel.

La neutralité suisse : un cliché sans vérité ? Les dix textes de ce recueil explorent cette question en croisant les points de vue.
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..