Aujourd’hui, il l’aborderait; il en avait tellement envie! Elle l’intriguait, cette fille et il souhaitait en apprendre plus sur elle. Il connaissait déjà son nom : Charlie Bennette. Il l’apprit lors d’une transaction. Que de fois, d’un rayon voisin ou du comptoir, il avait contemplé ses traits délicats et ses grands yeux noisette qui brillaient dans la pénombre. Ses cheveux d’un brun clair regorgeaient de vitalité. Elle rayonnait et inspirait la joie de vivre. Pour l’avoir observé tant de fois, il savait qu’une petite fossette se formait sur sa joue gauche quand elle souriait. Il avait remarqué ses dents blanches et ses lèvres rouges qu’il souhaitait embrasser. Personne, parmi ses amis, ne semblait la connaitre. Il avait fait le tour du campus et ne l’avait croisée nulle part. À la bibliothèque, il avait risqué plusieurs tentatives pour entamer une discussion quand elle remettait ses livres ou en réservait de nouveaux, mais, elle était toujours pressée de repartir. Il connaissait bien ses goûts littéraires pour l’art et savait qu’elle avait également un petit penchant pour les livres ésotériques; particulièrement ceux se rapportant aux rêves prémonitoires.
Les rêves prémonitoires sont uniquement pour la personne concernée c’est-à-dire moi. Je fais des rêves qui me donnent des indices sur des éléments à venir de ma vie. Pas sur d’autres individus et surtout pas du tout sur ce qu’ils pensent. Les « rêves émotifs », comme je les nomme depuis que je suis une petite fille, me fournissent des indices dans le but de me préparer à un événement qui approche ou un événement important. Ce n’est jamais vraiment simple à identifier, car parfois, il arrive que ce ne soit pas un rêve, mais uniquement des images ou des éléments significatifs pouvant indiquer le sujet de la prémonition. Parfois, mis à part l’émotion ressentie, rien ne précise ce qui va se présenter.
Ces prémonitions étaient parfois bien compliquées. Il fallait toujours interpréter. D’ordinaire, elle laissait filer sans trop se préoccuper de la signification. Ses parents n’avaient pas de don de prévoyance et ils vivaient parfaitement heureux. Sa maman lui disait que parfois, faire des rêves prémonitoires n’était pas quelque chose de facile. Sybile, dans sa façon de vivre, ne voulait pas connaitre ce que l’avenir lui réservait. Elle l’apprendrait en temps et en heure au moment prévu.
En rêve, elle se vit, se promenant sur le trottoir par un beau jour ensoleillé, son carnet de croquis à la main et son sac en bandoulière. Alors, elle eut l’intime conviction qu’elle réaliserait son rêve de faire des études supérieures. Elle en parla presque tous les jours avec sa mère pendant la semaine qui précéda son inscription. Durant leurs échanges, sa mère l’écoutait religieusement échafauder toutes sortes de plans et de projets d’avenir.
C’était la première fois qu’il réussissait à se tenir aussi près de Charlie. Elle sentait bon, remarqua-t-il! La fraicheur du printemps! Non! En fait, elle sentait le bonheur. Si le bonheur avait une odeur, ce devait être celle-là! Il se dit que cette fille l’attirait comme un aimant.
Parfois, mes rêves me donnent un indice concernant un événement à venir, mais il est difficile d’en identifier le sens exact.