ma meilleure amie traînant une valise de carton au son de la marche des rats du meublé
il faisait toujours trop chaud ou trop froid
à se les geler et les jeunes filles étaient amoureuses des combattants du dollar et je traînais ma valise en carton
à travers le Texas,l'Arizona,,la Louisiane, la Géorgie,la Floride,la Caroline du Sud j'étais cinglé
j'étais malade incapable d'affronter l'évidence et je finissais à picoler du gin sur les matelas crasseux de nulle part
à rendre les punaises alcooliques elles aussi je faisais des projets de suicide qui
échouaient, et je finissais avec des petits boulots fastidieux les heures comme des cibles réduites en bouillie par quelqu'un qui s'en foutait quelqu'un de plus intelligent que moi.
je ne pouvais pas demander à Dieu de me sortir de là
mais dieu que je vidais de bouteilles des centaines et des centaines de bouteilles emportées par les fleuves de nulle part et on peut dire ce qu'on veut des méfaits de la boisson mais sans elle je n'aurais jamais pu affronter ces contremaîtres aux yeux de rat et au front
étroit ces ouvriers qui se contentaient de leurs vacances et de leur assurance sociale le véritable esclavage humain de ces hommes qui ne savaient pas qu'ils étaient des esclaves et qui se croyaient les
élus c'était la bouteille et seulement la bouteille et toutes les bouteilles qui me permettaient de vivre
ça.
chaque jour
à rêver du soir où je serais de retour dans ma chambre allongé sur le lit dans le noir sans chaussures
à déboucher la bouteille et à boire avec délices la première gorgée pour chasser la pourriture la décrépitude
à allumer une cigarette et
à aimer les murs et la clarté de la lune
à travers la fenêtre j'inhalais le monde pourri et je l'exhalais juste comme
ça puis je reprenais la bouteille non pas faible mais fort:
une grande lampée reposant la bouteille:
chacun lutte
à
sa manière.