Charlie Bregman

Seule la peur est responsable de la souffrance.

Les enfants disent des évidences que les adultes ne savent plus entendre.

Sommes-nous l’espèce la plus intelligente de notre planète, ou en sommes-nous devenus l’espèce la plus nuisible ?

L’amour…
Notre seul remède.

— Et c’est quoi, leur définition d’un bon écrivain ?
— Dans la tête des écrivains qui n’ont pas de lecteurs, un bon écrivain, c’est un écrivain qui n’a pas de lecteurs.

La bousculade des heures, la répétition des jours, le défilement des semaines, des mois, des années, et puis se retrouver là, un beau jour, face à son miroir comme on se retrouve face à un inconnu, à ne plus savoir quoi dire et quoi faire de ne plus pouvoir se reconnaître.
Nous vivons tous ces vies-là. Nous vivons tous ces inaccessibilités au monde et au moment présent, aux vents qui soufflent, aux tempêtes qui se lèvent, aux pluies qui ruissellent et aux parfums des amoureuses qui s’effilochent irrésistiblement le long des quais des gares qu’on laisse derrière soi.
Nous vivons tous cette mort-là.

Ça peut paraître insignifiant, mais celui qui sauve un moineau a l’impression de se reconnecter avec toute une humanité.

Moi, j’ai dix-sept ans. J’ai rien vécu en vrai, et je connais déjà tout de ce qu’ils me proposent de découvrir. Avec dix ans, vingt ans, peut-être même trente ans d’avance.
Le seul avenir qu’on m’offre, c’est de trouver un moyen de les réveiller.

Putain, allez tous crever.
Le monde que vous nous avez donné est un monde entièrement saccagé. Totalement ravagé.
Sans espoir.
On devrait tous pouvoir vous exiler au bagne au fin fond du système solaire, sur un caillou dans lequel vous n’aurez plus qu’à revivre l’histoire du silex et de la guerre du feu.
Bande d’abrutis.
Bande de dégénérés.
Et vous osez vous prétendre adultes ?
Mais être adulte, ce serait déjà commencer par vouloir mettre un terme à votre cécité ! Ouvrir les yeux et vous réveiller, bon sang ! Qu’avez-vous fait de tout ce qui était là ? Qu’avez-vous fait de tout ce qui était parfait ? Qu’avez-vous fait, à part vous massacrer, tuer, violer, saccager, détruire, instaurer le pouvoir, répandre la terreur, créer des esclaves, endoctriner des enfants, faire couler les larmes et le sang ?
Eh oui ! Vous pouvez les maudire, vos émissions de télé, vos programmes conseillés, standardisés et bien canalisés ! C’est trop tard, maintenant ! Grâce à eux, Génération Désenchantée a les yeux grands ouverts, la colère bien remontée et les poings bien serrés !
La vie que je veux n’est pas celle que vous nous donnerez. Allez tous vous faire exploiter par vos banquiers. Même l’air qu’on respire, vous avez réussi à l’empoisonner.

Leurs guerres à n’en plus finir, leurs démocraties mensongères, leurs trafics d’armes et leurs bombes chimiques, leurs étendards de la liberté au-dessus des réserves de pétrole, leurs images détournées et leurs foules manipulées, leurs pesticides à outrance, leurs produits chimiques qui nous stérilisent, leurs vaccins qui nous canalisent, tout ça, ça m’en donne la marée nauséeuse, le vomissement au bord des lèvres, et la honte de faire partie de ce genre humain suffisamment lobotomisé pour être devenu totalement déshumanisé.
« Il va falloir que tu deviennes adulte, bordel ! »
Bah oui, bah pourquoi pas, tiens ? Non mais c’est sûr qu’en voyant ce que vous êtes devenus, le produit me fait trop envie ! T’as raison ! Mais pourquoi j’hésiterais ? C’est où, qu’on signe ? Tu vas toucher une prime de parrainage ? T’auras droit à une retraite anticipée, quand tes enfants se seront bien rangés ?

Les poètes sont les plus brillants. Ils ont tout compris. Ce sont eux, que nous devrions écouter à la place de nos politiciens et nos banquiers !
Les poètes sont nos rois. Nos guides, nos pharaons.
Nos allumeurs de réverbères, nos bergers incompris qui ne cherchent qu’à protéger leurs moutons.
Ils réveillent nos audaces, ils ravivent nos étincelles. Ils nous chantent des rêves qui nous propulsent et des amours qui nous grandissent.

Une immense partie de l’espèce humaine n’a pas accès à l’amour à sa faim. Son énergie ne dépend que de celle qu’elle parvient à tirer de l’empathie de ses congénères, de leur compassion, de leur écoute et de toute autre forme d’attention. Avez-vous seulement conscience de ce que certains sont prêts à dire et faire, pour obtenir votre soutien implicite ?
Combien de manipulateurs ? Combien de menteurs, de falsificateurs de la réalité, prêts à tout pour se rehausser, pour se redorer une image, pour se faire une place au soleil ? Combien de calomniateurs, de juges permanents, de critiques unilatéraux, de dictateurs de la pensée et de spécialistes du détournement de la bienveillance ?
Avez-vous seulement compté, autour de vous, combien sont ainsi prêts à tout, pour vous rallier à leur cause ?
Combien sont prêts à rabaisser les vivants pour vous prouver à quel point ils peuvent être moins morts ?

L’égarement est une chose absolument terrible, pour celui qui n’a pas conscience qu’il n’y a pas un refuge où aller là où l’on ne sait pas partager son authenticité.

La meilleure de toutes les armes contre le regard des autres, c’est toujours l’humour.

Vous vous rendez compte, quand même, à quel point on nous a légumisés ?

Un artiste, c’est pas fait pour le mensonge. C’est pas fait pour l’illusion. Pas fait pour la résignation. Ça ne vit pas comme les autres, et ça n’a d’ailleurs pas du tout les mêmes besoins.
Ça vit d’amour et d’eau fraîche.
Ouais. Montre-nous que c’est possible, ça ! Qu’on pourrait tous vivre dans un monde meilleur dans lequel on ne vivrait que d’amour et d’eau fraîche, parce que nous, on n’y croit pas. On a perdu tout espoir. Il n’y a que les artistes et ceux qui vibrent d’amour et de rêves de paix, qui nous donnent du bonheur dans notre vie de merde. Tu comprends ? Sans eux, on ferait quoi ? Pas de musique, pas de spectacles, pas de cinéma, pas de chanteurs, pas de bouquins, pas d’histoires, pas de sourires, pas d’émotions…
Putain. Tu te rends compte, quand même ?
Sans les artistes, on vivrait tous comme si on était déjà morts !

On m’a programmé à devenir un de tous ces cons. Un gars banal, un mouton dans le troupeau, sans talent, sans valeur ajoutée, sans rien à débattre et sans rien à revendiquer. J’ai plus qu’à me contenter de petits CDD de misère, à croiser les doigts pour qu’on me vire pas pendant ma pause toilettes, et pis aussi pour avoir encore un peu de tunes passé le 15 du mois pour pouvoir me payer quelque chose à bouffer en attendant le 30.

Être un artiste, dans le monde dans lequel on vit, c’est une malédiction.

Un jour, avec tout l’argent qu’on leur laisse empocher avec le travail que nous leur fournissons, ils nous remplaceront par des robots pour continuer de facturer tous les projets de leur indépendance financière pendant qu’à nous, il ne nous restera plus que nos yeux abîmés pour pleurer.
J’ose leur en parler ?

Faire confiance à quelqu’un qui t’accorde sa bienveillance, c’est déjà ouvrir une porte sur des avenirs improbables.