Il apparaît ainsi clairement que l’invention d’un auteur fictionnel, double extérieur de l’écrivain déplacé à l’écart de la réalité, n’est en rien une tentative de déresponsabilisation : l’auteur réel ne dédouane pas l’auteur réel de sa création mais exhibe au contraire le problème que pose sa revendication d’autorité dans le monde littéraire. Si la figuration dans la littérature d’une crise de l’autorité est déjà ancienne (sous la forme d’une crise du sujet, notamment), il semble que celle-ci ait pris un tournant particulier dans l’époque contemporaine, ou du moins qu’elle s’accompagne d’une autoaccusation qui rend possible l’écriture : grâce à la mise en récit et à la représentation d’un personnage distinct de l’auteur, l’examen d’autorité dans la littérature s’éloigne de tout risque de paralysie créatrice et il n’est pas rare qu’elle donne lieu à une œuvre longue et dense (…)