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Citation de Cielvariable


Gabrielle secoua la tête ; peut-être avait-elle eu tort de revenir à Québec. Mais à quoi toutes ces années de méditation auraient-elles servi si elle fuyait son passé au lieu de l’affronter ? Elle se revoyait en Inde, au centre de spiritualité, pleurant sa lâcheté, son silence coupable, prête à tout pour purifier son âme. Combien de thérapies avait-elle expérimentées avant de comprendre qu’elle devait accepter d’avoir été cette jeune femme qui avait abandonné un mort en pleine nuit au lieu de le veiller jusqu’à l’arrivée des secours? Elle devait croire qu’elle n’était pas totalement mauvaise puisqu’elle aidait beaucoup de femmes et d’hommes à être bien dans leur corps. À Vancouver, elle avait appris les techniques de massage. Et le yoga. Et le parapente. Et le trapèze. Elle avait toujours été sportive mais s’était découvert une vocation pour l’entraînement. Elle voyait avec bonheur des filles trop grosses s’épanouir dans ses cours d’aérobie, des garçons relever la tête, oser se regarder dans une glace en constatant que leurs épaules, leurs bras, leurs mollets se développaient.
Elle serait la meilleure des entraîneurs dès le lendemain ! Ne lui avait-on pas répété chez Best, à Vancouver, qu’on la regretterait et qu’elle pouvait revenir et retrouver son emploi à n’importe quel moment si elle ne se plaisait pas à Québec ? Son patron était sincère quand il affirmait qu’elle était son entraîneure préférée. Elle ferait tout pour être aussi appréciée au gym du Nouveau Quartier. Et elle se plairait à Québec. De toute manière, elle ne serait pas en permanence face à ses souvenirs, car elle habiterait à Saint-Roch où tout avait changé. Elle avait bien fait d’acheter la veille les deux derniers romans de Michel Tremblay. Retrouver le personnage de Nana la distrairait, la réconforterait, calmerait son anxiété. Pourquoi est-ce que tout ne se déroulerait pas à merveille demain ?
Elle se glissa sous les couvertures, saisit son roman et se demanda quelle allure pouvait avoir Montréal lorsque des tramways quadrillaient la ville.
***
Au Bistrot du Clocher penché, André Rouaix et Pierre-Ange Provencher sirotaient un Morgon en attendant leurs plats. Le partenaire de Graham et l’officier de la Sûreté du Québec avaient pris l’habitude de se retrouver, quand leur travail le leur permettait, les mercredis soir alors que l’épouse de Rouaix était à son cours d’aquarelle.
Quand Liette, la sommelière, déposa le boudin noir aux pommes caramélisées et la joue de bœuf braisée aux légumes racines, Rouaix sourit.
— Maud nous envierait si elle savait ce qu’on mange. — Elle ne doit pas faire pitié à Rome, tout de même !
—Non, j’ai reçu un courriel où elle me nargue en évoquant le meilleur carpaccio de sa vie, ses orgies d’artichauts frits et un somptueux Barolo Chinato qu’elle a dégusté avec Alain! Il est chanceux d’avoir été invité à ce colloque. Moi aussi, j’irai à Rome quand je serai à la retraite.
Il y eut un silence qui s’étira avant que Provencher avoue sa déception causée par la démission d’un de ses hommes, au lieu de demander à Rouaix s’il était certain de vouloir prendre sa retraite l’année suivante. C’était une décision si personnelle.
— Nous, on nous envoie une nouvelle, annonça Rouaix. Tiffany. C’est un nom bizarre. On n’a pas d’autres
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