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Citation de AireLibre


Tous les matins, je dois coudre. Ma mère m'attend dans la grande salle. Elle est assise devant le feu. Elle ignore le soleil d'automne qui trempe les pierres et tape contre les murs. Au-delà de la ville, les collines se laissent brûler le dos. Pourquoi restons-nous enfermées ? Je voudrais aller coudre sous l'arbre de la cour. Nous serions assises dans la lumière orange. Autour de nous, les toits et les clochers deviennent d'une pureté irréelle. Leurs contours sont très foncés. Ils tranchent avec l'éclat du ciel. L'ombre et le soleil se battent sans se mêler, dessinant l'échiquier que mon père installe pour les invités. Cette danse de noir et de blanc se déroulerait pour nous seules. Une voisine passerait, le panier rempli de poires, pour nous donner des nouvelles du monde. Elle dirait en me regardant : " Comme tu es jolie ! " Ma mère sourirait. Je serais heureuse d'être sous l'arbre à cet instant. Ce bonheur m'appartiendrait, blotti en moi comme un cœur orange.

Ma mère ne sourit pas quand je descends l'escalier. Peut-être que je ne suis pas assez jolie. Je dois m'asseoir. Je pose le tissu sur mes genoux. Il fait si chaud devant ce feu. Je sens mes doigts s'alourdir. Ils gonflent comme des tonneaux. Je suis sûre qu'un jour ils se détacheront pour tomber à mes pieds et je ne pourrai plus jamais manier l'aiguille.

Ma mère dit qu'on ne trouve pas de mari si on ne sait pas coudre.
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