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Citation de Luniver


[Notre curé de Castres] ignorait que chez une nation des plus riches de la planète se lèveraient un sentiment diffus d'insatisfaction, un désarroi des esprits qu'aucun avoir, qu'aucun confort, qu'aucune protection sociale, qu'aucune accumulation de biens ne pourraient apaiser. Et qu'au contraire, le progrès, la croissance de la consommation matérielle et l'excroissance de l'Etat providence creuseraient en nous une sorte de boulimie inassouvie, une rage d'avoir et une difficulté d'être nouvelles. Un vertige aussi devant la multiplication des biens comme des systèmes hors de toute maîtrise intellectuelle, dans une sorte de prolifération implacable qui rappelle les progrès de la drogue ou les métastases cancéreuses. Une anxiété devant la société éclatée aux fêtes éteintes, aux traditions perdues, aux hiérarchies bousculées, où tout est de plus en plus permis et de moins en moins désiré ; un tournis devant cette comédie médiatique du simulacre, où s'évapore, sur ondes et écrans, le sel de la vie, où s'émiette et se dissout le grain des hommes et des choses ; un ennui devant des arts où l'on imite, adapte et glose et où l'on crée de moins en moins ; une angoisse devant cette anarchie cellulaire des groupes sociaux, devant cette saturation de sons, d'images, de mots qui étouffe le sens de tout, devant cette mutilation d'un homme réduit dans la termitière sociale au rôle ingrat et perpétuellement insatisfait d'objet économique. Le futur n'est plus ce qu'il était. Il ne nourrit plus l'espérance comme chez notre curé de Castres : il inquiète s'il ne nous désespère pas. Notre futur a de moins en moins d'avenir.
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