Méfie-toi des jugements hâtifs, des amalgames faciles. Ce sont des œillères qui pipent les dés. Et font des dégâts énormes. A vivre, à parler ensemble, on s'apprivoise. Le blanc n'éblouit plus, le noir n'est plus si ténébreux. Le quotidien met de la couleur.
Dans les contes, les méchants sont méchants et les bons sont bons. Dans la vie, c'est moins simple. Tout n'est pas noir ou blanc, tout est mélangé, emberlificoté, empêtré.
Attaque sur la ville. Je marche dans la nuit, dans le vide, fatigué, usé.
Je crie pour tuer l'accident dans ma tête. Je veux une chaise, je veux avant.
J'ai froid. Je pense à ma femme, aux enfants. Mes chers petits. Arriver à la maison, ouvrir la porte. Les embrasser. Jouer avec eux, manger, boire, rire autour de la table. Mes mains dans les leurs.
Parents nus, familles sans pied, véhicules en feu, pleurs, peurs dans les yeux. Images volées d'un spectacle noir, d'un monde en panne. Pas un nez qui bouge, pas un vieux dehors, pas un jeune à toucher, pas un homme, pas un animal, ni plumes, ni poils, même pas un insecte. Juste moi, froid comme un caillou, seul, cassé, perdu.
Pas le temps d'ouvrir un livre. Pas la tête surtout. Elle qui normalement s'étourdit dans la lecture de romans. Il n'y a pas meilleur remède pour s'envoler du quotidien.
Ce voyage est devenu un enjeu immense. Une bouée, un mirage qui lui permet de ne pas dériver.