Une petite fille amoureuse du vicaire de la paroisse dans le Québec des années 60-70
Rassurez-vous, il ne s’agit pas d’une histoire de pédophilie. Ce sont d’abord les fantasmes d’une fillette un peu négligée. Parce qu’elle a les « yeux croches », son strabisme est vécu comme un reproche par sa mère avec qui elle ne s’entend pas. Elle n’a pas beaucoup d’amies à l’école, malgré (ou à cause de) ses bons résultats scolaires. L’arrivée dans sa vie d’un jeune vicaire est un évènement marquant. Elle rêve qu’il deviendra son mari et les visites hebdomadaires « à la confesse » deviennent des moments exaltants. On suivra l’évolution de leur relation à travers l’adolescence et jusqu’à l’âge adulte.
Même si les passions de l’enfant peuvent sembler exagérées, le roman permet de raconter un peu l’atmosphère de l’époque, l’importance de la religion, mais aussi la condition des filles et des femmes.
Une lecture intéressante, juré craché!
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Le récit d'un amour inconditionnel d'une enfant (Camille) pour un prêtre (Romain) qui évoluera et survivra aux années qui passent...
Une écriture de temps en temps fraîche, tendre ou drôle, et qui sent le vrai, sauf parfois une trop grande maturité, une trop grande force prêtée à Camille dans son jeune âge. L'auteure secoue les institutions cléricales, les hypocrisies de bien de nos comportements sociaux en général, religieuses en particulier. Elle parle de nos soifs d'aimer et de l'être..
L'auteure pose des questions autour des amours intergénérationnelles, de leurs limites, de leurs moralité, ou légitimité.
Cependant, l'épilogue me laisse sur ma faim, un peu insatisfait. J'aurais préféré que l'auteur laisse la porte ouverte à tous les possibles. Finir par quelque chose comme :
"Je suis encore venu, Romain, corps à corps, cœur à cœur, tellement tout contre. Tu m'aimes, je le sais. J'ai posé tes mains sur ma peau, je les sens qui voudraient, non, qui veulent, mais je les bloque, parce qu’il faut que tu le dises enfin. Après, tu pourras, nous pourrons. J'ai 18 ans maintenant, tu me feras doucement parce que si, en fait je suis vierge. J'ai toujours voulu toi d'abord. Aime-moi, comme tu aimes ta Marie même si c'est pas pareil; ne serait-ce qu'une fois, puisque après tu dois partir. Dis-le moi Romain, parce que c'est vrai, dis-le, dis-le !"
Point.
Oui, laisser plutôt le lecteur dans l'ignorance. C'est le diable qui tente, ou Dieu qui offre ?
Le prêtre se laissera-t-il aller à un instant de grâce ? La vraie chasteté, c'est peut-être d'abord avoir vécu l'amour physique amoureux pour savoir ensuite ce à quoi renonce. Pourquoi refuser un îlot de bonheur qui n'a pas été cherché mais juste offert, qui ne retire rien à personne et fait au contraire des gagants gagnants d’une joie partagée ? Une respiration pour mieux continuer ensuite sa vie en apnée sexuelle ? L'amour véritable se joue de la raison. Si Romain refuse au grand jour que Camille l’a bel et bien conquis, l’intensité de ce qu’il éprouve pour elle, ne risque-t-il pas une frustration telle qu’elle semera son poison tout au long des années à venir ? Et si ce n'est pas pour lui, que ce soit au moins pour Camille, honorer un minimum, au moins une fois, cet amour depuis tant d'années donné, tous ces sacrifices de jeunesse consentis pour lui.
Ou alors plutôt ne pas rompre un serment dans les bras d'une gamine, profiter de la candeur de l'enfance puis de l'adolescence, se parjurer pour un amour amoral et sans lendemain. Quel crédit ultérieur donner à des sermons si on ne sait pas soi-même vivre ce que l'on dit ? Peut-être laisser ouvrir une porte qui pourrait permettre ou excuser bien des faiblesses ulltérieures...
Oui, laisser le dilemme en suspens, laisser le lecteur imaginer ou choisir, car les deux voies sont échec ou réussite, ou les deux tout ensembles.
De toutes façons, on se régale, on en redemande : je me suis surpris à reprendre le livre au début...
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