Miroir, miroir, qu’en penses-tu ? Le miroir sembla lui parler, et elle eut l’impression que la vilaine reine lui répondait. Pas mal, mais pas génial non plus. Toutefois, si l’on prenait les choses du bon côté, elle se demandait de quoi certains de ses vêtements auraient l’air si sa démarche déhanchée n’existait pas. Elle savait déjà que Mac l’appréciait. Il devait aimer les femmes légèrement enveloppées. Dieu soit loué ! D’ailleurs, la manière dont il l’avait retenue signifiait qu’il n’était pas indifférent à ses rondeurs. Il ne ressemblait pas à certains hommes du genre de ce richard sophistiqué qu’elle devait rencontrer demain, des personnages sur lesquels on ne pouvait se renseigner sur Internet sans les voir en photo accompagnés de top-modèles, des nababs aux cheveux gominés rabattus en arrière, aux énormes lunettes griffées par quelque designer à la mode, aux costumes sombres ; des types mielleux et irritables. Beurk !
Une seule nuit… Elle avait été claire. C’était son choix. Alors au diable les réserves ! Demain, de toute façon, il prendrait le large, comme d’habitude. En revanche, cette Sam semblait être une personne entreprenante, autonome et aimant s’amuser. Elle semblait loin d’avoir le profil d’une de ces femmes émotionnellement instables, collantes et dangereuses comme l’héroïne de Liaison fatale. Elle était charmante, mais aussi maladroite que celles qu’il avait connues. Il ne s’agissait dans le fond que d’un rendez-vous. Pourquoi ressentait-il une telle agitation dans tout son être ?
Elle détestait mentir, car l’une de ses qualités primordiales était l’honnêteté, ce qui n’avait pas été le cas au cours de ce voyage, semblait-il. Il ne s’agissait pas vraiment d’un mensonge. Les enjeux étaient sur la table, l’investisseur milliardaire devait la rencontrer le lendemain et l’affaire pouvait théoriquement être conclue dans une trentaine de jours.
En tous les cas, avec toutes les tensions et les mésaventures qu’il avait subies dernièrement, il avait besoin de se perdre dans une femme et de s’y anéantir. Si cet après-midi pouvait lui fournir certaines indications, disons qu’avec cette dame, il filait droit vers une forêt insondable, mais exempte de petits cailloux blancs pour retrouver son chemin.
Il détestait mentir dans les meilleurs moments de son existence, bien qu’il ait souvent raconté des histoires dans les pires, à une époque où le mensonge faisait partie du jeu, tout spécialement dans sa jeunesse, lorsque des femmes étaient en cause. Mais tout le monde peut changer, n’est-ce pas ?
La tentation d’embrasser ces lèvres une fois de plus était irrésistible chez Sadie, mais elle n’était pas femme à se lancer dans une aventure qu’elle savait ne pas être en mesure de conduire à terme. Aussi recula-t-elle en poussant un soupir.