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Critiques de Enrique Medina (4)
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Les Chiens de la nuit

« Le ciel noir a brillé intensément puis s'est éteint discrètement. » C'est ainsi que je referme ce livre bouleversant.



Il y est question de la misère sociale à Buenos Aires. Enrique Medina parle bien de ce sujet et son résumé de la situation est juste et sans appel : « Personne ne dit : ''A celui qui travaille de ses mains, qui se lève à quatre heures du matin pour pointer à l'usine à sept, qui se casse le cul pour nourrir sa famille, il faut lui donner davantage parce que c'est lui qui fait tourner le monde''... Personne ne dit ça, tout le monde pense qu'il n'a qu'à se faire foutre et c'est marre... »



Mingo, 18 ans et sa sœur Mercedes, 15 ans se retrouvent orphelins, sans argent, ils cherchent à s'en sortir. Leur mère vient de décéder. « Quel sens donner à la vie ? Maman. » Le père est parti peu avant la naissance de Mercedes et n'est jamais reparu.



« Naître c'est déjà courir un risque, non...? »



Mingo a toujours été pouponné par sa mère, habitué à être traité en pacha, il ne sait rien faire et surtout ne veut rien faire. Sa sœur aimante prendra la suite de la mère décédée et s'occupera de lui. L'argent manque, il ne fait rien et le maigre salaire de Mercedes provenant de l'usine ne suffit plus. D'autant que Mingo cherche les embrouilles et se retrouve en prison pour vol. Elle en vient à perdre son travail.



Il a alors l'idée de la prostituer. Elle, qui n'est pas la plus belle du quartier, qu'aucun garçon ne regarde, tombe de l'arbre. Histoire de lui faire bien comprendre qu'elle va devoir obéir, Mingo emploie la méthode forte. Elle pliera, parce qu'au fond elle pensera ainsi expier. « On est nos propres esclaves les uns des autres. »



On entre dans la spirale infernale. Des chapitres sont vraiment très durs. Mais on espère un rayon de soleil. Idiote, naïve que je suis !! « Tu me dégoûtes et je me dégoûte, moi, je sais, parce que je le sais, la vie est une saloperie puante, ce qui me fout en rogne c'est que les gens soient si naïfs et cons et qu'ils passent leur temps à répéter des phrases toutes faites que les grands enfants de putains ont créées pour que les tarés les répètent comme des perroquets. »



Ils vont aller de cabarets en cabarets, elle fera son numéro de stripteaseuse, aguichera les clients et prendra le pèze. C'est son métier. Mais Mingo « son sauveur » est toujours dans les embrouilles, il boit, joue.. et doit de l'argent. Elle sera l'une des mises lors d'une partie de cartes. Mingo perdra. Comme toujours. Et comme toujours, elle perdra avec lui. Enrique Medina constate que Mingo est un fainéant, un maquereau mais ne le juge pas. Qu'aurions-nous fait dans une telle situation, quand la vie se résume à cette réalité : « c'est tous contre tous, un contre tous, tous contre un. »



J'aime l'écriture de Enrique Medina. Ses mots tragiques sont enlevés. L'écriture est percutante et profonde, entre deux il arrive à avoir une pointe d'ironie plaisante. « Mercedes, alias ma fille, a levé un regard interrogateur sans capter la question de l'ours noir qui la fixait de ses yeux de statue maculée de chiures d'oiseaux en été. »



La prostitution vue par Médina, c'est le système qui est dénoncé. Il les connait les putes, les seules personnes qui ont son estime : « J'aime les putes. Je leur dois le meilleur de moi-même. »



« ... l'être humain, l'être le plus infect et pourri qu'il y ait sur terre, excepté les putes, hein ? »
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El Duke

Dans une cahute d'un bidon-ville, El Duke se planque. Et sa vie lui revient dans une succession de flashes.

Ouvrier d’usine, tueur des abattoirs, aventurier dans le Sud, boxeur, homme de main puis exécuteur d’une mafia, El Duke est de ces êtres « que nul n’a le courage de tirer au clair ».



Sombres, âpres, dérangeants, sans la moindre concession, El Duke d’Enrique Medina décrit l’Argentine des perdants, de ceux qui sont tout au bas de l’échelle sociale. Des gens durs, qui vivent des vies pénibles et ne voient la plupart du temps pas d’autre échappatoire que la débrouille et l’exploitation de ceux qui sont encore plus faibles qu’eux.



Chez Medina, les pauvres sont victimes mais pas aimables. Ils sont exploités mais ne revendiquent rien, ils se contentent de se battre pour s’en sortir. Tous les moyens sont bons, et tant pis pour ceux qui se trouvent sur leur chemin. C’est la misère totale, financière, culturelle et morale, dans toute sa brutalité.



L’écriture d’Enrique Medina est au diapason, aussi rude et dure que ce qu’elle décrit. Ses romans sont autant de gifles.



Avec cette chronique de l’ignominie dont Enrique Medina s’est fait l’écrivain. récit explosé, ponctué d’interviews, d’extraits de combats, de saynètes d’atrocité, autour d’un monologue intérieur au gré de la mémoire, El Duke tendait à la dictature militaire argentine et à ses escadrons de la mort le miroir de leur abjection.



La junte ne pouvait qu’interdire ce livre, ces « mots faits de chair, quand le prix à payer pour une telle témérité était la mort ».



Un auteur à découvrir impérativement, déconseillé quand même aux âmes trop sensibles, et à ceux qui veulent garder quelque illusion sur la nature humaine.
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Les Chiens de la nuit

Je connais assez peu la littérature sud-américaine, mais au fil de mes découvertes sporadiques et jamais décevantes dans ce domaine, j'ai pu constater que les œuvres des auteurs issus de ce vaste territoire qu'est l’Amérique latine, ont souvent une dimension tragique. Constat que la lecture du roman d'Enrique Medina, "Les chiens de la nuit", a contribué à conforter.



Mingo a dix-huit ans. Déscolarisé depuis longtemps, il a jusqu'à présent vécu aux crochets de sa mère, qui peinait à entretenir leur minuscule taudis et à faire bouillir la marmite en exerçant d'éreintants et précaires boulots mal rémunérés. La mort de sa mère, brutale, représente par conséquent un cataclysme dans son existence. Il se retrouve seul pour assumer sa subsistance et celle de sa sœur Mercedes, âgée de quinze ans. Sa paresse le pousse à chercher le gain facile, mais après quelques larcins, il se retrouve en prison, expérience traumatisante qu'il n'oubliera jamais...

A sa sortie, il trouve une nouvelle solution à ses problèmes d'argent : il commence par céder le pucelage de sa sœur contre un prêt de mobylette, puis l'amène, peu à peu, à se prostituer de manière régulière.



L'humanité que dépeint Enrique Medina est laide et barbare. La relation entre Mingo et Mercedes est elle-même, par moments, bestiale, la sollicitude de la jeune fille étant souvent récompensée par des coups. Baignés dans un environnement sordide de misère et de violence, ils sont finalement deux enfants grandis trop vite, perdus dans un monde abject, dont ils sont obligés, pour survivre, d'adopter les codes, même si cela implique de se vautrer dans la fange.



Les chapitres, courts, se succèdent à un rythme vertigineux, la sécheresse de l'ensemble du texte étant parfois entrecoupée de phrases plus longues, dont la poésie soudaine sert une réalité brutale et glauque. Une réalité qui laisse très peu de place à toute tentative d'introspection, d'analyse, par les héros d'Enrique Medina. Ces derniers brûlent leur existence en préférant occulter toute réflexion de nature à leur faire prendre conscience de sa maigre valeur.
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Les tombes

L'écrivain argentin Enrique Medina a huit ans lorsqu'il est placé en maison de redressement par sa mère. Il y restera jusqu'à ses seize ans. "Les tombes" est le récit de cette expérience. Une expérience de violence et de cruauté, qui impose, pour y survivre, de devenir soi-même dur et impitoyable.



Le roman est une description froide et minutieuse, en boucle, des sévices que les surveillants sadiques font subir aux pensionnaires en toute impunité, des coups, des viols et des brimades que les enfants s'infligent les uns aux autres. Car si les adultes sont tout puissants, dans cet univers où leurs hôtes n'ont aucun droit, une hiérarchie tacite mais incontournable régit les rapports entre les jeunes garçons. Les "merdeux" (les moins âgés) se soumettent aux diktats des moyens, eux-mêmes contrôlés par les grands. Les plus faibles, en fonction de leurs attraits physiques, deviennent des souffre douleur ou des objets sexuels. Des liens se nouent aussi, parfois, comme ceux qui unissent le narrateur à Martinez, un adolescent tranquille mais qui en impose par son courage. Peu à peu, le héros fait sa place dans cet enfer, apprend à encaisser comme à donner des coups, et parvient à acquérir le respect de ses camarades.



La narration de ce quotidien sordide de bagarres incessantes, d'humiliations récurrentes, est déroulée avec une sécheresse atterrante qui provoque chez le lecteur une répulsion à la limite de la nausée. On a l'impression que ces enfants vivent dans un monde à part, avec ses règles, qui les ampute de toute aptitude à la compassion. On a du mal à trouver attachants ces gosses violents, parfois vicieux, au comportement bestial, même si l'on est conscient qu'ils ne sont finalement que les victimes d'un système engendrés par la misère, et entretenus par des adultes eux-mêmes insensibles et pervers.



Un texte difficile, donc, même si le langage argotique du narrateur confère à l'ensemble une gouaille qui peut faire sourire...


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