Royalistes en France : absence de leader politique, désaccord sur la personne royale et déficit... .
https://www.franceculture.fr/emissions/hashtag/les-mandats-sont-trop-courts-pour-mener-des-politiques-le-roi-cest-la-continuiteSpécialiste de l'histoire des élites, Eric Mension-Rigau répond à Anne Fauquembergue

Boni est outré car les Gould vont désormais intervenir dans ses affaires. L'idée que son beau-frère devienne le modérateur officiel de ses fantaisies, notamment de sa passion pour les objets d'art, l'insupporte. La presse attise son exaspération en le brocardant à qui mieux mieux : elle ironise sur le "bouchon" mis sous la forme d'un conseil judiciaire à "la goulden fountain" pour freiner "la danse fantastique que la comtesse fait exécuter aux dollars du papa Gould." Persifleurs, les journalistes font mine de s'apitoyer sur "le triste sort et la détresse" de la malheureuse comtesse qui ne dispose plus que de son simple revenu, soit de la bagatelle de "huit-mille-deux-cent-dix-neuf francs dix-sept centimes par jour ..." Enfin, la médiatisation de la décision de la justice et, surtout, la certitude que la liquidation du passif durera des années, en raison du caractère inaliénable du capital qui produit les revenus d'Anna, font frémir une meute de créanciers dont les récriminations s'ajoutent, des deux côtés de l'Atlantique, au tapage des journaux.
Sans surprise, chez Boni, le répertoire des invités correspond au Bottin le plus mondain, complété par les vieux fonds religieux hérités des fréquentations de sa grand-mère, du cardinal-archevêque de Paris au professeur à l'IInstitut catholique. Il y adjoint deux touches personnelles, mais qui ne surprennent guère : les artistes et les académiciens à la mode dans le grand monde - on est "à la page" - pas d'avant-garde - et les amitiés idéologiques forgées dans le combat anti-dreyfusard, d'Henri Rochefort à Edouard Drumont en passant par le général de Boisdeffre.

Le vécu dont Proust s’empare pour construire son monde de fiction a pour source principale, outre quelques confidences, les médisances et les ragots. Il se délecte de la compagnie des domestiques qu’il arrose de pourboires pour les remercier d’êtres ses indicateurs. Pour trouver « des histoires qui seraient restées insignifiantes si son génie ne s’en était emparé »*, il herborise principalement dans « deux bonnes loges de concierge ». La première est le Ritz. Son maître d’hôtel, Olivier Dabescat (modèle d’Aimé, maître d’hôtel du Grand Hôtel de Balbec dans La Recherche), qui n’ignore rien de la société parisienne, se rend souvent chez lui la nuit, son service terminé, pour le renseigner. Les deux hommes peuvent discuter des heures. La deuxième loge est celle d’Albert Le Cuziat (modèle de Jupien), qui rencontre Proust en 1911, alors qu’il est valet de pied du prince Orlov. Le romancier, qui l’appelle « mon Gotha vivant », apprécie son érudition en matière d’étiquette et de généalogie et, en 1916, lorsque celui-ci ouvre une maison de passe dans l’hôtel Marigny, rue de l’Arcade, il peut compléter ses informations mondaines par des renseignements sur les mœurs des uns et des autres. De la société aristocratique, l’auteur de La Recherche n’est ni acteur ni observateur de premier rang, comme le furent Mme de Sévigné, Saint-Simon ou la comtesse de Boigne. Mais il a parfaitement compris son fonctionnement et excelle à jauger les attitudes et les conduites.
* É de Gramont, Marcel Proust, Christian de Bartillat, 1991
De la difficulté de la transmission:
La génération à qui incombe de prendre le relais ne cache plus ses réticences, tant elle est consciente qu'une énorme bâtisse implique un projet de vie imposant choix et renoncements, parfois en désaccord avec ses aspirations. Souvent épuisée par une vie professionnelle harassante, elle argue de son besoin de plage, de soleil et de vrai repos, impossible à trouver dans un château dont le fonctionnement est toujours lourd, pour la châtelaine en particulier.p124