AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Charybde2


Et c’est reparti, mon cher calepin. Te voilà tout neuf, bourré de pages blanches qui attendent d’être remplies. Quel plaisir d’être enfin en route ! Les monts Alleghany sont déjà derrière nous, comme des vagues vert pâles sur un étang couvert d’algues. Je repense aux premiers jalons posés en vue de ce voyage – il y a presque un an ? Ces sous-entendus astucieusement distillés à la Maison-Blanche pour que le président s’en imprègne malgré lui ; et puis tout a soudain coagulé dans son esprit avant que le grand homme nous fasse part de ce qu’il prenait pour une audacieuse idée personnelle : okay, envoyez donc quelqu’un là-bas accomplir une mission tout sauf officielle – un journaliste qui ne soit pas trop identifié à l’administration pour qu’il puisse fourrer son nez un peu partout, lancer quelques ballons d’essai -, ça ne peut pas faire de mal ! QUelle excitation lorsqu’il a enfin abordé le sujet publiquement, à l’issue d’une importante conférence de presse sur le Brésil ! Son célèbre ton confidentiel… Puis il m’a glissé qu’il avait concocté un projet assez aventureux et qu’il voulait m’en parler en privé.
Sa prudence relevait-elle de l’habitude, ou bien le président me faisait-il comprendre à mi-mot qu’en cas de pépin tous les responsables politiques américains nieraient l’existence de cette visite (et du visiteur) ?
Ma mission constitue une ouverture importante dans notre politique étrangère, et des arguments de poids la justifient. L’heure est venue, peut-être, de panser cette plaie fratricide qui a déchiré la nation, pour que le continent puisse être uni contre les vagues de famines et de révolutions qui déferlent sur le monde. Les faucons désireux de récupérer par la force « les terres perdues de l’Ouest » semblent de plus en plus nombreux et doivent être neutralisés. Les idées écotopiennes sont une menace qui traverse la frontière, elles ne peuvent plus être ignorées, mais on peut sans doute atténuer leurs effets nuisibles en les exposant au grand jour. Etc.
Peut-être trouverons-nous une oreille complaisante pour reprendre des relations diplomatiques ; peut-être aussi des échanges commerciaux. Avec la réunification en ligne de mire. Même une simple discussion publiable avec Vera Allwen serait utile : le président, avec sa souplesse habituelle, pourrait s’en servir pour apaiser à la fois les faucons et les groupes subversifs. Et puis, comme je l’ai dit à Francine – qui même après trois cognacs s’est moquée de moi -, j’ai envie de découvrir l’Écotopia parce que tout simplement elle existe. La vie y est-elle aussi bizarre qu’on le raconte ?
J’ai beaucoup réfléchi à ce que je n’ai pas le droit de faire. Je ne dois pas évoquer la Sécession proprement dite, car ce sujet engendre toujours beaucoup d’amertume. Mais il y a sans doute des articles passionnants à écrire : comment les sécessionnistes ont volé de l’uranium dans les centrales nucléaires pour fabriquer les mines atomiques qu’ils prétendent avoir posées à New York et Washington. Comment leur organisation politique, dirigée par ces foutues bonnes femmes, a réussi à paralyser, puis à supplanter les institutions officielles et à prendre le contrôle des arsenaux et de la Garde nationale. Comment, à coups de bluff, ils ont réussi à imposer leurs vues séparatistes – aidés par la gravité de la crise économique américaine qui pour eux a été une aubaine. Voilà des histoires qu’il faudra raconter un jour, mais ce n’est pas encore le moment…
Commenter  J’apprécie          00









{* *}