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Citation de palexandre


Cette femme, Béatrice, ne devais-je pas plutôt m’en méfier ? Elle était trop intelligente et trop malheureuse. Névrosée au dernier degré. Oui, et alors ? Je marchai d’un pas pressé, mon être tout entier empli de fougue, et comme portée par celle-ci. Ainsi donc, je me rendais chez elle. Je n’avais pas le choix. Il me fallait agir de la sorte. Une force m’y poussait, qui me dépassait, dont je ne cernais pas les contours, mais qui s’imposait à moi. Avec fatalité ? Tout de même pas. L’heure n’était pas si grave. L’heure était propice, c’est tout. Il ne s’agissait que de curiosité, de dissiper un doute. Rien n’était innommable dans mon existence. Il existait des mots et des phrases pour chacun de mes sentiments. Je n’étais pas un personnage de Beckett. Je n’étais ni Malone, ni Molloy. Mon moi, au contraire de ces personnages, était identifiable. Je le connaissais. L’être qui résidait en ce point n’était pas sans nom, sans passé, sans possibilité de se frayer un chemin dans un champ symbolique de visions et de sensations. Je n’essayais pas d’être ou de devenir, comme Malone ; j’étais. Je n’avançais pas masqué dans la vie, ni n’étais en quête d’identité. Je me connaissais par cœur, comme dirait un collégien. Du moins le croyais-je. Il fallait le vérifier tout de suite. Béatrice. La revoir. M’assurer que je n’en étais pas amoureux. Me délivrer d’un songe ou d’un sort funeste. Elle était un peu sorcière sur les bords, oh oui, car magique, ou magicienne. Étais-je ensorcelé ? Je pressais le pas dans les rues, je courais presque, en fait. C’était comme si la ville n’avait pas d’existence, avec ses passants, ses immeubles, qui étaient comme autant de décors nébuleux à l’intérieur d’un rêve. J’évoluais dans une contrée qui n’était que le miroir déformant de mon esprit – j’allais dire mon cœur. Le lien qui les reliait l’un à l’autre était rompu. Le lien qui me reliait à beaucoup de choses était rompu. Mais au moins, j’en avais fini avec les tergiversations. J’allais droit au but, comme une flèche filant au centre de sa cible.
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