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Critiques de Fanny Wodmann (3)
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Les arbres quand ils tombent

Le récit de Fanny Wobmann explore la question des souvenirs d'enfance confrontés à des réalités qu'il était a priori impossible de percevoir pour un enfant mais qui suscite pas mal de questions pour l'adulte qu'il est devenu. Il s'agit en l'occurrence de son enfance à elle, passée pour quelques années au Rwanda et à Madagascar selon les choix professionnels opérés par ses parents (son père était une sorte d'ingénieur en agroforesterie envoyé en coopération pour le gouvernement suisse). Confrontée aux écrits de poètes, auteurs ou intellectuels elle s'interroge sur sa perception des relations avec celles et ceux qui faisaient partie de son quotidien là-bas, domestiques, voisins, camarades de classe... et revisite ses perceptions à l'aune de ce qu'elle a appris depuis. Pas simple de fouiller dans des souvenirs lointains et parfois recouverts, ou de s'en remettre à d'autres traces comme ce film documentaire où apparaissent ses parents et qui donne une vision qu'elle n'avait pas envisagée de cette manière.

Cette approche sincère nous fait voyager entre Suisse et Afrique, au rythme des pensées de l'autrice qui tente de faire surgir le plus clairement possible une réalité qui de toute façon ne peut être que partielle. Mais on le sait depuis longtemps, peu importe la destination, c'est le voyage qui compte et en l'occurrence ce cheminement intellectuel a le mérite de nous donner à réfléchir sur la façon dont chaque avancée en âge et en connaissance peut nous amener à voir différemment les événements passés.
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Les arbres quand ils tombent

« En malgache le verbe être n’existe pas. »



Méticuleux, « Les arbres quand ils tombent » est un viatique. Un pont entre deux rives.

Vertigineux, solaire, sociologique, son intimité excelle entre les pages et devient un porte-voix.

Politique, spéculatif, il rassemble l’épars de vie, d’une petite fille : Fanny Wobmann jusqu’à l’heure pleine de maintenant.

L’urgence de collecte fait saillir ce qui fut de l’enfance de Fanny au Rwanda et à Madagascar. Ses parents expatriés, son père qui travaillait pour la Direction du développement et de la coopération, dans la gestion des forêts. L’Afrique comme un appel d’air. Petite fille de huit ans, ses sœurs, Juliette quatre ans et Chloé deux ans. Cercle enfantin qui font vivre dans une insouciance de caste. Dans l’inconscience d’une prise de pouvoir sur un peuple pauvre et en voie de développement.

Fiananrantsoa, une grande maison blanche, coloniale et imposante. Un gardien qui ouvre le portail. Madagascar, « Une amie m’a fait remarquer un jour que vivre à Madagascar m’avait donné l’occasion d’assouvir mes rêves de princesse (ou bien était-ce mon psy?). »

Le récit est une fenêtre qui s’ouvre sur les idiosyncrasies, les habitus. Fanny Wobmann veut comprendre. Apaiser ses doutes, renouer les liens avec Nirina, son amie malgache qui jouait avec elle, des heures durant.

« Dans cette histoire, il y a aussi Nirina. Un amour qui construit, l’enfance rire contre rire. Puis la distance ».

Complices et gémellaires, les mêmes robes cousues par la mère de Nirina. Happées par la spontanéité et l’innocence.

D’inspiration autobiographique, l’anthropologie tirée au cordeau, ce livre échappe aux règles d’une fiction. Il est consigné à la résurgence. À la mutation des psychologies et des analyses fines d’une femme qui trace son arbre de vie avant que les branches ne tombent.

Ce livre est de trajectoires. La correspondance avec Nirina adulte, est à double tranchant. On ressent Fanny quêter la réponse. Apaiser ses craintes, sa culpabilité. Le colonialisme dépassait sa tête enfantine. Elle veut comprendre, ressentir, pardonner, mais quoi ?

Elle, qui a griffé son amie noire, elle, qui se trouve trop humaine. Elle, qui vivait à Madagascar, libre et aérienne, le mimétisme et la gloire d’oublier ses yeux bleus et sa blondeur.

« Nous portons des robes et des chapeaux de paille malgaches ».

Elle n’aura de cesse de dresser le macrocosme de cette décennie qui s’étire encore en elle.

Cette terre exotique, surprenante, suffocante et sublime dans une exceptionnelle aura.

Là-bas et ici, la chronologie qui bouge ses aiguilles jusqu’à notre présent.

Ses parents impliqués et justes, le colonialisme sans emprise mentale. S’approprier pour demain ce qui définie la grande Histoire du monde.

Bâtir un livre à la lumière vive des souvenirs et d’une éducation altruiste et libre. Le vivre-ensemble comme un cerceau qui roule sur une cécité qui s’endort à jamais.

Femmes blanches et noires, sans distance, avec l’amie de chaque minute qui s’abreuvait dans la souplesse d’une quiétude stable et confortable. « Je pense aux arbres quand ils tombent » litanie et kaléidoscope fondamental, où la progression interpelle une renaissance en advenir. « Je voudrais me souvenir du ravenala, j’ai une image de lui avec une branche cassée, mais peut-être était-il déjà comme ça avant le cyclone. A-t-il survécu ? » Ce livre des révolutions intérieures qui s’approche du secret d’une écriture exhaustive, est puissamment signifiant. S’échapper des frontières mentales, l’ethnologie est l’encre de ce livre régénérant. Loin des diktats de servitude, l’heure n’est pas ici. Mais dans cette universalité des amitiés enfantines et fédératrices. « Les arbres quand ils tombent » stylistiquement charnel et vibrant, la culture du vivant, des différences assemblées, Nirina est l’emblème-même de l’exploit des dépassements. Le pouvoir de l’homme sur l’homme. Ici, Fanny trace au trait rouge la politique. « Toi t’es malgache ? Toi t’es pauvre ? » L’humanitaire comme un témoin-clé des colonisations africaines. « … Le bruit de la masse qui rencontre le sol, les branches qui se cassent, le souffle. Puis le silence. Le géant endormi. »

Intense et d’une forme inégalée, reformuler l’aquarelle, du Jura neuchâtelois, la narration happe et retient en haleine jusqu’aux forces étourdissantes de ce qui fut en vérité, de cette enfance en métamorphose de couleurs. Éloignée des considérations d’adultes, des jugements. L’espace libre comme un cerceau en pleine lumière. Madagascar, le Rwanda, le racisme latent, les stéréotypes, dans l’ignorance d’une enfance de privilège.

Ce livre aux multiples signaux et lectures, est poétiquement une merveille. C’est un macrocosme existentiel. Une renaissance, dans l’instant même où les arbres tombent, autrement. La prodigalité. Publié par les majeures Éditions Quidam éditeur.
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Les arbres quand ils tombent

L'autrice a vécu enfant au Rwanda, puis à Madagascar. C'est cette dernière période de vie qu'elle raconte dans ce livre. Mais ce sont surtout les questions coloniales et raciales qui sont soulevées. Lorsque, adulte, elle se questionne sur le bien-fondé de cet épisode, elle se sent mal à l'aise : raconter son expérience en tant que famille blanche dans une maison cossue avec du personnel malgache, parmi la population locale souvent pauvre, en évitant la condescendance n'est pas chose aisée.



Le texte est entremêlé de lettres avec son amie d'enfance, Nirina, avec qui elle a repris contact à l'écriture de ce livre. On y apprend plus sur ce qu'a ressenti cette jeune fille malgache par rapport à son contact proche avec cette famille blanche.

Le processus d'écriture et le questionnement sur les conséquences d'un tel livre sur les liens familiaux de l'autrice font partie intégrante du texte.



Le style d'écriture, l'authenticité et le souci de transparence dont fait preuve l'autrice, les lettres de l'amie, le processus d'écriture, le fait de remettre en question l'éthique familiale, l'implication et l'immersion du corps et du cœur de l'autrice dans la nature, sont tout autant d'éléments qui m'ont beaucoup plu.

Des fautes de frappe m'ont néanmoins dérangées (de grosses coquilles), et ont consolidé mon impression que le texte n'est pas abouti. C'est un texte subtil, mais qui parfois manque d'assurance à mon goût.

Néanmoins, je l'ai dévoré et eu beaucoup de plaisir à le lire. Les références a la fin donnent envie de creuser encore les questions du colonialisme et de la domination blanche.
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