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Citation de RChris


Edmond m’embrasse, je l'embrasse et on s'embrasse. J'ai jamais fait ça avant. C'est simple. Il me semble que j'ai toujours su, et tout ce qui suit aussi, je l'ai toujours su, toujours voulu. On est serrés l'un contre l'autre, comme si on voulait broyer nos deux coeurs pour qu'il en reste qu'un seul, et on le sait même pas quand ça arrive, on se pose même pas la question tellement c'est l'évidence. Nos bouches réunies pour la première fois, c'est comme le premier vol d'oies sauvages au printemps avant que le ciel se remplisse d'oiseaux qui s'en vont là où ils doivent aller depuis toujours, là où il y a du soleil. L'écurie, c'est rien d'autre qu’un pays de ce genre où il fait beau et chaud. En vrai, ce pays, on sait qu'on l'a atteint quand les bouches suffisent plus. Edmond m'allonge sur la paille. Artémis bouge pas, j'entends sa respiration au début, et puis je l'entends plus. Tout ce que fait ensuite Edmond, je le fais aussi, avec l'assurance d'un de ces oiseaux qui sait où se termine le voyage, cette paille dorée à l'odeur de brûlé. Je sens même pas son poids sur moi. Je sens plus que son odeur, ses mains, ses lèvres, sa peau. Je le ressens, lui. J'ai jamais été aussi heureuse, aussi sûre de savoir ce que je veux, ce que je suis, puisqu'il m'en donne l’occasion. Je le pense si fort que je le lui dis en vrai. Il me répond que lui aussi est heureux, ou peut-être que je l'imagine, que c'est rien qu'un écho dans son souffle. En tout cas, ses yeux et ses gestes mentent pas. Il retire ce qui le gêne pour qu'on soit encore plus près, tellement près, qu'on sait même plus ce qui appartient à l'autre. C'est simple. Et puis, quelque chose me déchire doucement, quelque chose que j'accepte dans mon corps comme si c'était une partie de moi qui me manquait, et que je le savais pas avant ce moment-là où la fille que j'étais devient une femme. J'ai pas mal. J'ai confiance. Le temps est ailleurs. Edmond s'arrête pour me regarder. Je pleure de bonheur. Il recommence à bouger, d'abord lentement, puis de plus en plus vite, puis il se raidit comme un bout de bois, et se détend, plusieurs fois de suite. Je sais qu'il m'offre quelque chose. Je le reçois, même si je sais rien de ce qu'il m'offre en vrai. Je sais même pas quoi lui offrir en retour, à part la lumière qui jaillit en sens inverse de lui par mes yeux grands ouverts, ma manière de le remercier pour tout ce que j'ai cru pas être la réalité, jusqu'à ce que je me retrouve dans le tourbillon, que je le retrouve, qu'on se retrouve, la seule réalité, celle d'hier, celle d'aujourd'hui, celle de demain, celle de toujours, de cette vie et celle d'après cette vie.
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