C’est que c’est dur de vivre en marge. Même quand on sait qu’on ne pourrait vivre leur vie. Je l’ai essayée, la droite ligne. Effroyable. Comment peuvent-ils ?... Oui, mais ma vie n’a ni queue ni tête, la leur a eu une tête et aura une queue, et le jeu consiste à aller de la tête à la queue en accumulant les points, ça s’appelle « progresser », afin d’avoir, au bout de tout ça, « bien rempli sa vie ». Pour qui ? Pour quoi ? Pour des dieux qu’ils s’inventent afin d’avoir quelqu’un à craindre et à qui rendre des comptes ? Pour un dieu intérieur qu’ils nomment « conscience », « honneur », « fierté », « sens du devoir », « émulation », « esprit de sacrifice » ... ? Pour que leurs gosses, ces gouttes de sperme éparpillées aux quatre vents, soient fiers d’eux quand ils n’y seront plus ? Pour épater la postérité ? Pour... pour... ?
La vie est un jeu de l’oie, sauf que la dernière case, celle du triomphe, est aussi celle de la tête de mort...