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Citations de Françoise Hàn (18)


Françoise Hàn
NOTES EN MARGE


De l'ouvert
on ne parle pas

Les peintres chinois
devant l'ouvert
tracent d'un pinceau léger
une calligraphie

La nuit
parfois
dans l'absence de couleurs
(mais c'est une image grossière)

L'impossible
n'est pas l'ouvert

ce qui reflue
des rives de l'été
quand la lumière vacille
n'est pas l'ouvert

ce qui paraît au-delà
de la musique
de l'amour
des grands pavots silencieux
n'est pas l'ouvert

car dans la musique
dans l'amour
dans les fleurs
circule toujours
l'idée de la mort

l'éternité
n'est pas l'ouvert

Maintenant
s'il y avait un maintenant
sans passé
sans futur
non traversé
inaccompli
toujours en train de s'accomplir

maintenant serait-il
aurait-il une ressemblance
évoquerait-il
de très loin
très faiblement

cela
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Françoise Hàn
Premier continent



Il n’y avait personne encore.

La Pangée* sortait à peine de l’océan, des sacs de nuit pendus
à ses flancs. Il ne se peut pas que nous en ayons souvenir.
Que nous retrouvions l’éclat sur la pierre du premier rayon
de soleil.

Nous le cherchons pourtant. Il nous manque certains
matins où, dans les remous de la mémoire, les anneaux des
mondes perdus glissent les uns sur les autres. Nous prenons
notre respiration profondément, comme si à notre tour
nous sortions des eaux. (Quelqu’un ricane : l’air en ce
temps-là n’était pas respirable).

Nous nous écartons de nos ténèbres, de nos années révo-
lues, de nos vies antérieures, nous tentons de remonter
jusque là où il n’y avait pas de vie.

Pourtant, il y eut émergence, il eut séparation. Il y eut rivage, il y eut
tracé d’un dessin à la surface du globe.

Il y eut le jour et la nuit sur un continent aveugle. Etait-il
trapu, compact, ou déjà traversé de failles ?

Et quand le premier caillou s’est-il détaché ?


* La Pangée est un supercontinent formé au Carbonifère de la collision de la Laurussia et du Protogondwana et ayant regroupé presque l'ensemble des terres émergées.
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Françoise Hàn
Roches éruptives



Comment les tutoyer ? Basalte, porphyre, feldspath, granit,
les nommer quand elle sont immobiles ne dit rien de la
violence qui les a projetées hors du magma originel.

Le feu n’y reprendra jamais. L’herbe ne saurait y pousser,
encore moins les moissons. Leurs abîmes ne sont pas les
nôtres. Elles ne sont pas les ruines de nos mondes anciens.
Elles ne résument pas notre histoire, la supportent, blocs
premiers, sans y prendre part. Elles sont d’un autre passage,
plus lent que le nôtre. Beaucoup de temps est derrière elles,
sans qu’elles nous aient attendus.

Gardent-elles mémoire de paysages que nous n’avons pas
connus, que nous essayons, en fixant sur elles l’objectif, de
faire reparaître sur les clichés ?

Elles n’ont pas été semées par un géant soucieux, comme le
petit Poucet, de retrouver le chemin du retour chez soi.
Elles ne jalonnent aucun projet d’itinéraire. Elles ne sont
pas même les indices d’une errance.

Malgré tout, elles s’ancrent dans le poème et les mots se
resserrent.
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Quelque part dans le plasma, des étoiles naissent …



(…) Quelque part dans le plasma, des étoiles naissent, vivent
en brûlant leurs réserves, explosent, éclairent le ciel de leur
mort fastueuse.  Ou se font naines noires, éteintes, tandis
que leur lumière passée nous parvient encore.  Ce ne sont
pas des ratures dans un récit. C'est le jaillissement et la re-
tombée, étirés dans une durée qui n'est pas la nôtre.

Notre double ne sait pas plus que nous quand la mort survien-
dra. Il joue franc jeu avec elle : qu'elle donne sens à notre errance.

Il s'en tient à la vie humaine. Elle ne brille pas beaucoup dans le
noir, mais elle garde assez de chaleur pour que l'encre n'y gèle
pas.

Écrire, dit le double est possible. C'est une petite phrase. Elle
contient notre avenir.
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Géode



Trois flocons de neige
trois gouttes de temps
enfermées dans une pierre

le souvenir est une géode
à ne pas fracasser

que le poème soit ce caillou
au cœur duquel cristallise
un peu de lumière adolescente
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LEVER DU JOUR/CHANSON D'AMOUR



Dessinant dans la nuit
l'arc phosphorescent de nos vertèbres
nous sommes revenus

on pouvait suivre nos traces
doubles
descendant de galaxie en galaxie

nous avons touché là-haut des minerais
aux teneurs fabuleuses
nos empreintes digitales
sont poudrées de métaux rares

nous sommes de nouveau parmi vous
notre absence a-t-elle duré longtemps
vous nous paraissez plus jeunes
qu'à notre départ
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Un été sans fin…



Un été sans fin

Je ne t'écrirai plus

le solstice est brisé
nos paysages
ensevelis
je n'écrirai pas notre mémoire

je m'adresse à d'autres
au-delà des coulées de lave
haute de plusieurs siècles
au-delà des étoiles éteintes
dont la lumière parvient encore
à la main qui écrit

je m'adresse à ceux qui s'aimeront
bien plus tard quand les jours
seront devenus plus longs
pour qu'ils recommencent notre histoire
sous un autre soleil

leurs ombres seront les nôtres
ils auront notre voix peut-être
nos silences
sur les mains le pollen des fleurs
que nous n'avons pas coupées
qui sait même la rosée d'un matin.
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Un trait…



Un trait, et c'est l'immensité . Le peintre a besoin d'un peu
d'encre, et du vide : l'espace est là, disponible et frémissant.
Ainsi, ce qui fut une fois une caresse fait naître l'étendue qui
ne sera jamais saturée.

Tu es l'autre, mon double différent, mon versant au-delà du
partage des eaux. Je te sais plus loin que la ligne de crête que
je ne franchirai pas, que le fil d'une attente qui défie l'érosion.
Mais  nous sommes aussi du même plissement,  de la même
roche cristalline soulevée et fracturée dans la dérive des conti-
nents. Je couvre de signes ce qui nous sépare ;  lents insectes
acharnés à gravir, pattes et crissements, bouts d'ailes dépassant
les élytres, reflets sur un dos chitineux, l'un d'eux restera-t-il gra-
vé sur la paroi ?
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Françoise Hàn
Ecorce terrestre



Le langage, seconde écorce terrestre, se plisse, se creuse,
s’élève selon les divisions, les dérives, les soubresauts du
monde. Le poème prend appui dans ses fissures. Verticale
souvent tordue, il grandit à flanc d’abîme. Aucune logique
ne le tient là.

Il coordonne le vide au paysage habité.

La vie est-elle venue d’ailleurs ? Tombée sur terre avec une
pluie d’étoiles filantes ? Ou s’est-elle formée lentement,
peut-être au fond des mers, peut-être au creux des vagues,
peut-être sur les argiles aux rayons du soleil ?

Le poème puise à plein sol aussi bien que dans les détritus
qui jonchent la surface, en voie de devenir humus.

Humus, déjà si près de l’humain.

Et la soif ? Très en dessous, la nappe phréatique, est-ce le
silence ? La parole est-elle parodie du monde ou sa vérité
exsudée ?

Le paysage humain, un jour, disparaîtra. Le vide n’en aura
pas de convulsions. Leurs destins ne sont pas parallèles.
Falaises et montagnes, océans et rivages ne porteront plus
de nom, la terre n’en tremblera pas.

Le temps battra sans doute en d’autres vies. L’éternité ne
recueillera pas le poème. Il n’en réclame aucune part.
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Entaillés…/la mémoire et l’oubli…
Difficile à dire/l’anfractuosité/où ils essaient de remuer
[…]


3
Depuis qu’ils ne comprennent
plus le langage des bêtes
il leur faut articuler
des mots sur la pierre
taillée
sur la cassure
d’avec les éléments
sur la blessure

des mots qui contiennent
assez de terre et d’eau
d’air et de feu
intersticiels
pour refaire un monde

articulé sur la faille
que ne combleront jamais
les sédiments
les forêts ensevelies
les civilisations

un monde seulement humain
exclu de la résonnance
première
mais rempli d’images de lueurs
qui bougent sur la paroi

parfois elle vacille
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Entaillés…
la mémoire et l’oubli
[…]


2
Difficile à dire
l’anfractuosité
où ils essaient de remuer

le dialogue s’y heurte
à des angles sourds
dérision de la caverne

l’écho ne revient pas
fait tache de moisi
sur la paroi

reste à trouver des sons
que ne déglutissent pas
les murs spongieux

des phrases
qui ne pourrissent pas sur pied

une écoute entre les mots
qui serait leur espace

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1


Entaillés
dans l’écorce terrestre

avec autour d’eux du temps
assez pour échanger
la mémoire et l’oubli

avec le labyrinthe
épuisant
où ils se sont laissés prendre

et leur chance
que l’outil ébréché
ait effrité la roche

quelque échancrure
où s’agripper
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Il ne trouve pas sa langue…



Il ne trouve pas sa langue. Il halète sur les talons d’une
muse invisible.
Jadis, croit-il se souvenir, l’air était bleu autour d’elle.
Elle s’arrêtait parfois pour l’attendre, posait la main
sur sa tête.
Elle lui disait un mot ou deux.
Maintenant, elle va dans un étourdissement perpétuel.
Il la suit, poussant à intervalles sa plainte inarticulée.
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Le soir venu…



(…) Le soir venu, l'écorce des mondes a plusieurs épaisseurs.
Quand les balles en traversent deux ou trois, elles finissent
par rencontrer une peau plus dure et ricochent dans le néant.
Oui, les soirs sont mitraillés, mais quelque chose reste sauf.
Ce qui fut nié, ce qui ne fut pas admis dans la trame des heures ;
ce qui migra profondément, se refusant aux divinités fécondes,
se retourne et sa face est sérénité.
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Ton ombre…



Ton ombre apprivoise les bêtes errantes,  chargées de tendresse
et de cruauté ; tu équilibres la balance des sables, dont un plateau
porte les fruits et les fraîcheurs de l'oasis,  l'autre la fascination
des ciels brûlés ; tu laisses grandir le jour du côté du matin. Et tu
vas en plein soleil à la recherche de tes puits.

Liberté des lendemains.

Il y a toujours une brume légère entre toi et moi.
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Envol


Fraîcheur
autour de moi
le vide
est mon élan
pour l'au-delà
des limites
pour l'au-delà
du vertige
l'univers
n'est pas à étreindre
je suis portée
bras étendus
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LETTRE



Tu es dans mon écriture
tu n’y serais pas
si tu n’existais pas en dehors d’elle
elle est
intensément
l’un de tes modes
d’être

Je t’écris
ne veut pas dire
j’écris à toi
mais j’écris
toi

J’écris ta vérité
dans ma propre vérité
ta présence
dans ma présence à la vie

Je ne t’enferme pas
quand j’écris
tu ne m’enfermes pas
quand j’écris
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EMPREINTES



La tendre obsession d'un nom
dans le quotidien clair obscur

ne contredit pas la liberté
fait alliance
contre la fatigue

Un pas depuis l'adolescence
accompagne

secret
il résonne
au plus intérieur

cherchant lui aussi
entre murs et méandres
où s'en aller vers plus d'horizon

repris à son insu par le cosmos
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