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Critiques de Frédérique de Gravelaine (2)
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L'Etat EDF

L'Etat EDF, de Frédérique de GRAVELAINE et Sylvie O'DY

Ce livre de la fin des années 1970 est assez représentatif à la fois de l'atmosphère du secret qui entourait alors les affaires de l'électricité, notamment d'origine nucléaire (elles parlent de la nucléarisation d'EDF, d'ailleurs) et des oppositions fortes au développement de l'énergie nucléaire. Fruit d'un véritable travail journalistique comme on voudrait en voir plus souvent de nos jours, donnant la parole (souvent anonyme) à plus de cent personnes, membres d'Edf, fonctionnaires, industriels, syndicalistes, scientifiques, paysans, avocats, hommes politiques, écologistes et journalistes, ce livre a un certain retentissement à l'époque et constitue toujours un témoignage précieux de l'état des débats sur des questions dont les citoyens sont plus ou moins exclus. Les promoteurs du nucléaire se sont toujours réfugiés derrière un débat parlementaire, qualifié de démocratique, pour mieux s'opposer à une véritable prise en compte des opinions qui traversent la société française. Décrivant au fil des chapitres le tout électrique-tout nucléaire, le monstre EDF, la morgue technocratique et les attaques subies par ce colosse aux pieds d'argile, les deux journalistes, l'une à L'Unité, l'autre au Quotidien de Paris, montre l'état d'un organisme tentaculaire et pourtant pas si tout puissant que cela.







L'identification Électricité-Énergie nucléaire-EDF



Dans leur conclusion, nous pouvons lire : "(...) L'identification de l'Établissement à l'énergie atomique est devenue un dogme. Elle ne laisse pas de surprendre : l'acharnement hors du commun avec lequel Électricité De France a élaboré puis mis en place le programme nucléaire français étonne d'autant plus qu'elle laisse quelques plumes dans l'affaire. (...)



En effet, EDF y perd à la fois du prestige et de l'argent. Elle expose au risque gravissime de ne pas livrer d'électricité, de ne pas remplir sa mission. Elle jongle, sur une corde raide, avec des milliards et se heurte à la contestation. Elle y perd aussi son unité : en façade, la voix officielle s'est durcie ; face à l'opposition, les réflexes de citadelle assiégée ont joué ; mais l'unanimité s'effrite, ses dirigeants continuent à affirmer que le choix nucléaire reste "la seule solution intelligente"... Il ne faut pas voir là de simples élucubrations, au contraire. Le programme Messmer décidé en 1974 coïncide parfaitement avec l'idéologie de l'entreprise. Il satisfait idéalement à la machine puissante qu'est EDF, à sa logique profonde : la taille croissante de ses équipements, la centralisation de sa production, son assurance de monopole proposant des solutions uniques. Elle n'a jamais failli ; le sentiment du devoir accompli - avec quel brio! - la protège de toute mauvaise conscience. Pourquoi le pays ne lui ferait-il pas confiance puisqu'elle a toujours réussi ce qu'elle entreprenait, puisque, grâce à elle, la France n'a pas manqué d'électricité depuis l'après-guerre?



Le pari nucléaire répond aussi à la foi dans le progrès partagée par des hommes qui paraissent réciter leur credo sans s'interroger. Pas de doute scientifique à EDF, mais des certitudes techniciennes. Et la griserie que procure l'exploit technique, la performance économique...



Depuis sa création, l'entreprise peut se vanter d'avoir accompli bien des tours de force. Mais elle est sortie de son strict rôle. Devenue à bien des égards la première autorité du pays en matière de politique énergétique, EDF se prend pour Énergie de France. ce dérapage, elle n'en assume pas seule la responsabilité. Pour la plus large part, la faute en incombe au Pouvoir. Tous les gouvernements ont fait la preuve de leur incompétence et de leur indécision, de leur incapacité à contrôler EDF et à l'aider à assumer sa mission.



Au nom du libéralisme économique, les pouvoirs publics ont plutôt tendance à encourager les princes de l'industrie, menacés seulement par une hypothétique nationalisation. L'établissement public doit marquer le pas ; l'évolution ne déplait pas au Pouvoir qui ne perd pas une occasion de dénigrer ses entreprises nationalisées. (...).



Ce qu'EDF a perdu en autonomie pourtant nécessaire; elle l'a regagné en puissance. Une puissance malsaine puisque le cancer technocratique y prolifère. la boulimie de l'entreprise risque bien de se retourner contre elle. les tâches y sont parcellisées à l'extrême : chaque ingénieur devient un spécialiste ignorant du travail de son voisin. EDF se déclare seule capable de proposer une synthèse sur tous les travaux qui concernent l'énergie nucléaire. Rien n'est moins sûr. retranchés derrière leurs certitudes, les technocrates ferment les yeux sur cet éclatement des connaissances qui grignote le dernier atout d'EDF contre la cartel nucléaire : sa capacité de maîtrise d'oeuvre.



Prestigieuse maison, EDF avait un garde-fou : sa mission de service public. notion vague et changeante. S'identifiant totalement à la Nation, l'entreprise n'est plus en mesure de faire la part du feu entre l'intérêt national et le sien propre. La limite est fragile, aussi délicate à fixer que celle qui sépare les besoins des consommateurs des nécessités de l'établissement. A partir d'une idée juste - produire une énergie la moins chère possible - EDF, de sauts de puce en sauts de puce, en vient à demander au pays un véritable blanc-seing, persuadée que le programme nucléaire, aujourd'hui hors de prix, sera rentable dans dix ans.



L'enthousiasme nucléaire d'EDF transcende le rationnel : malgré les problèmes majeurs qu'elle rencontre, elle refuse de renier le moindre de ses choix ; au contraire, elles appuie de plus belle sur le champignon comme le conducteur néophyte accélère devant l'accident. En cela, elle trahit sa volonté de puissance. Qu'une entreprise de sa taille, de son importance pour la bonne marche du pays, ne succombe pas à la tentation du pouvoir eût été étonnant. La crise du pétrole l'a fortifiée dans sa position de leader : l'énergie devient rare et ses détenteurs puissants. Riche de cette reconnaissance, EDF s'apprête à dominer l'atome. Plus fort que l'eau, plus dangereux que le feu. De ce combat prométhéen, elle n'est pas encore sortie victorieuse. Loin de là.".







C'est par le détail de la structure et du fonctionnement de ce mastodonte, décrit surtout de l'intérieur - il faut lire les déclarations des responsables syndicalistes par exemple -, par la description des batailles de l'énergie (contre les Charbonnages, contre les technologies nucléaires concurrentes...), que ce livre reste actuel. Nombre des interrogations exprimées par les différents acteurs restent présentes, même si la situation économique, politique, sociale, n'est plus du tout la même aujourd'hui.
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Le grand Louvre : De la Pyramide à l'Orangerie

Un ouvrage intéressant, assez technique, qui permet de mieux comprendre l'évolution de cet immense palais qui n'était, à l'origine, qu'une forteresse destinée à protéger Paris face à l'ouest.

On peut suivre toutes les étapes, du Moyen Âge à la troisième République en passant par la Renaissance, des premières ailes à la fermeture de la cour carrée, jusqu'à la réunion du Louvre et des Tuileries.

ce parcours s'achève sous la pyramide de verre de Pei et nous apprend à lire les façades de ce monument.

On se rend au Louvre autant pour les oeuvres qu'il abrite que pour le lieu lui-même.
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