Gaston Leroux

– Cela devrait te réjouir, Lottie… Je vais te dire qui est cette Simonetta à laquelle tu ressembles si étrangement. C’est une enfant de seize ans comme toi, qui a tes yeux, tes cheveux, tes joues, ton printemps… la primavera !… ta bouche qui goûte l’air, ton long cou dressé comme une tige qui cherche à s’orienter dans le ciel… La voir, c’est aimer la vie, c’est se réconcilier avec elle… c’est découvrir les couleurs, les sons, les rythmes, les souffles, les parfums, les gestes et les âmes comme si on voyait ou sentait tout cela pour la première fois… La voir, c’est renouveler nos yeux… à nous autres artistes… Ne sois pas jalouse, Lottie !… Simonetta est venue au monde il y a plus de quatre cents ans. C’était une petite Florentine qui a apporté tout ce que je t’ai dit aux artistes de son temps dans les plis de sa robe, dans le déroulement doré de sa chevelure. Et, pour l’en récompenser, Botticelli l’a faite immortelle !… Eh bien, tu es ma Simonetta, à moi, comprends-tu, Lottie ? Je voudrais te faire immortelle à mon tour !… (p42)