Il faut savoir que la guerre est universelle, que la justice est une lutte et que tout arrive à l'existence par la discorde et la nécessité. (...) Les contraires se mettent d'accord, des sons variés résulte la plus belle harmonie et tout est engendré par la lutte.
De la multiplicité des choses provient l'Un, et de l'Un la multiplicité.
Héraclite
Après son succès à l'Académie, Largillierre apporta tous ses soins à se former une clientèle, car, si sa renommée était déjà grande, sa fortune restait à faire. C'est sans doute à cette époque qu'il se fixa rue Sainte-Avoye, et, dans son Livre commode pour 1692, Abraham du Pradel ajoute : « M. Largillierre, rue Sainte-Avoye, fait commerce de bons tableaux. » L'artiste, on le voit, ne négligeait aucune source de revenu ; s'il avait trouvé à Anvers le secret d'un métier solide et d'une couleur fleurie, il en avait rapporté également un goût de la brocante qui était bien dans les traditions flamandes ; le souvenir de l'atelier de Lely n'était pas pour l'en détourner.
Son brevet de maîtrise en poche, l'artiste se mit en quête d'ouvrage; comme il avait l'esprit aventureux et que les voyages n'étaient pas pour l'effrayer, il se décida à changer d'air et à tenter la fortune ailleurs. Les relations artistiques qui étaient à cette époque fort étroites entre les Flandres et l'Angleterre, l'exemple fameux de Van Dyck, qui y avait trouvé le succès et la gloire, l'attirèrent à Londres, où il entra, en 1674, dans l'atelier de Van der Faes, dit Peter Lely, portraitiste alors à la mode. C'est là que devait se décider sa vocation.
Décidé à se fixer à Paris et à s'y faire une clientèle, Largillierre comprit tout de suite qu'il fallait faire partie de l'illustre Assemblée. Il se présenta le 6 mars 1683 et fut agréé par la Compagnie, qui lui imposa comme morceau de réception le portrait de Le Brun. Le peintre Blanchard et le sculpteur Lehongre devaient, suivant l'usage, surveiller l'artiste dans l'exécution de son œuvre.