Gilles Clément

Ajouter à la maltraitance du milieu une maltraitance des êtres qui, malgré tout, parviennent à y vivre, c'est assurément condamner le territoire à la stérilité. Attaquer la vie ne résout en rien la perte de la diversité. Chacun sait que les décombres n'acceptent qu'une série limitée d'espèces -les rudérales- parmi lesquelles les exotiques sont plutôt bienvenues. Or, ce à quoi nous assistons -bien que ce mot ne soit jamais employé- c'est bien à une rudéralisation générale du territoire. Les techniques agricoles, celles de l'aménagement, l'usage que chacun fait de la nature, tout y contribue. Dès lors, comment s'étonner de voir s'installer la flore et la faune les mieux adaptés à cette évolution? A quoi servirait de lutter contre une dynamique qui trouve ici ses fondements logiques (biologiques)?
L'énergie dépensée à cette guerre pourrait, avec un bien meilleur profit, s'attaquer à la cause : requalifier le milieu.
Mais il est plus aisé d'identifier un ennemi contre qui diriger son énergie -surtout bien plus lucratif- que d'entamer une politique de décontamination du milieu. Cette idée ne vient même pas à l'esprit.