20 octobre 1914
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Au front nos conditions de combat sont de plus en plus pénibles : chaque armée creuse des trous et s'enterre dans des trachées qui se font face, à quelques centaines de mètres à peine.
Et à un moment donné, il faut donner l'assaut et en sortir, pendant que l'artillerie tire de tous les côtés et que les obus exposent avec un bruit assourdissant. La première fois j'ai cru que j'allais mourir sous l'effet de la peur qui me coupait les jambes.
Et sais-tu le pire, Anatole ? On s'habitue. On s'habitue à cette routine qui consiste à aller rencontrer la mort, ou à la donner. Au bout de quelques jours, nous jaillissons tous de nos trous en hurlant comme si nous n'avions rien fait d'autre de nos existences.