Il n’y a pas de place pour l’examen de l’équilibre physique, de l’acuité sensorielle, du goût esthétique, de l’esprit d’entreprise, du sens des initiatives, du goût des responsabilités, de la ténacité, de ce besoin de compagnonnage qui avec la générosité du cœur marqueront peut-être les hommes de demain.
(C. Freinet autour des évaluations scolaires académiques)
Tout à l’heure, j’entendais exprimer cette double exigence qui ne va pas de soi, car, semble-t-il, il n’y a pas d’harmonie préétablie : d’une part, le respect de l’enfant et de l’adolescent, saisis dans leur chair vive et à leur point de développement ; d’autre part, les exigences de la cité de demain.
Le corpus d’idées et de techniques pédagogiques désignées aujourd’hui par l’expression “Pédagogie Freinet” (on disait autrefois “techniques Freinet”) se distingue des autres pédagogies par ses choix pratiques et théoriques, bien sûr. Mais aussi parce que l’on peut parler, à son propos, d’une élaboration collective et coopérative de ces idées et de ces techniques. Certes Célestin Freinet est l’inventeur essentiel de la pédagogie à laquelle on associe son nom ; mais le propre du mouvement, créé par ce pédagogue-instituteur, est sa capacité à créer – et à recréer – coopérativement ses outils, ses techniques et même ses concepts. Ce fut le cas du vivant de Freinet, et à son initiative, du milieu des années 1920 au milieu des années 1960 d’abord ; puis cela a perduré après la disparition de celui-ci en 1966.
Pour nourrir sa réflexion critique sur l'école et l'aider à penser une autre éducation dans une autre société, Freinet dispose au moins de trois grandes sources d'inspiration : le courant politique libertaire qui tient la transformation de la société par l'éducation comme nécessaire à l'accomplissement révolutionnaire ; l'apport de la jeune révolution russe en matière d'invention de pratiques éducatives et de réflexion dans le champ des politiques éducatives et des politiques d'institutions ; et enfin les courants pédagogiques de l'éducation nouvelles.
L'éducation traditionnelle et ses différentes formes scolaire sont dénoncées pour le surmenage qu'elles organisent, pour le dressage éducatif (contrainte spirituelle et dressage du corps) qu'elles instaurent dans la contrainte, pour leur ignorance des tendances et des intérêts des enfants et des adolescents.
En 1947 quand le mouvement Freinet décidera de se donner un nom, il choisira celui de l'Institut Coopératif de l'école moderne.
L'imprimerie à l'école fait exister un objet impensé et impensable pour l'école traditionnelle: "un livre de vie".