Car sa démarche elle-même était pleine de bravade. Lorsque j'entendis cela pour la première fois, je me dis aussitôt que c'était remarquablement observé. Tout petit déjà, il m'était impossible d'imaginer mon père courbant l'échine. Et très tôt aussi, j'ai voulu le protéger. Il m'est toujours apparu comme la quintessence de l'indépendance. Cette impression très forte, mêlé à l'aspect irrésolu de son destin, a complexifié ma propre aptitude à l'indépendance. Nous avons tous besoin d'un père contre lequel se révolter. Lorsque votre père n'est ni mort ni vivant, lorsque c'est un fantôme, la volonté est impuissante. Je suis le fils d'un homme peu ordinaire, peut-être même le fils grand homme. (p. 51)