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Citation de ClaudeChenoz


Il faut toujours être circonspect dans la critique que l'on fait d'un classique. Il ne s'agit pas d'entrer en religion avec un livre (dieu merci, ceux-là font déjà assez de mal et sont en nombre suffisant). Non, simplement il faut rester modeste et penser a priori que ce qu'ils ont à nous apprendre est plus important que ce que nous avons envie d'en dire spontanément . La tendance actuelle est au jugement à l'emporte-pièce, basé surtout sur des critères très actuels. Comme dit Nabokov, rencontrer un grand auteur, c'est explorer un territoire non défriché par nous et donc difficile encore à déchiffrer car nous n'aimons pas nous sentir en perte de repères. Je raconte tout cela, parce que Balzac ne me laisse pas indifférent. Il me perturbe car il peut m'émerveiller, me captiver mais aussi m'ennuyer, m'irriter. Parfois, je le trouve prodigieux, unique (je ne crois pas que ce soit un hasard si ses romans les plus lus se trouvent être "Eugénie Grandet" ou "Le père Goriot", je les trouve parfaits dans leur construction, leur dramaturgie, la vérité psychologique des personnages. "La Cousine Bette" est captivant comme un roman policier, frisant parfois les limites du Grand-Guignol, et "Le Colonel Chabert" un des plus poignants que j'ai lus.) Pour résumer, j'adore Balzac, et avec toute ma modestie de lecteur, je trouve qu'il boite souvent. Ou alors c'est mon astigmatisme qui est à mettre en cause, ce que je n'exclue pas encore une fois. Le fabuleux artiste qu'il est, parfois nous donne des meubles vraiment bancals. Je ne suis pas d'accord avec Jean Giono qui trouvait que c'était un très mauvais écrivain. Je dirai qu'il me semble inégal. Un architecte merveilleux souvent et souvent un artisan brouillon. Comme chez tous les grands auteurs, Cervantès, Shakespeare, Molière. Leurs imperfections nous les rendent plus proches de nous, plus attachants. Je suis très partagé en ce qui concerne "la femme de trente ans". Je vais le relire. J'y ai quand même noté des manques, et même des incohérences. J'ai trouvé par exemple le chapitre intitulé "Le Doigt de Dieu" vraiment confus. Qui est ce narrateur du début qui parle à la première personne pour disparaître au milieu du chapitre, en sachant que le reste de la narration du roman est à la troisième personne ? Après la mort du petit Charles, on retrouve Julie (que Balzac appelle à un moment Juliette) et son amant, avec auprès d'eux un petit Gustave, dont on ne sait pas grand-chose. C'est un récit très elliptique et c'est au lecteur de combler les trous. Je trouve que ce roman brille plus par son argument que par sa dramaturgie, même si certains passages très "scéniques" (l'entrevue du curé et de Julie; la complicité de la vieille comtesse et de la jeune mariée) permettent par l'émotion qu'ils suscitent d'emporter l'adhésion du lecteur.
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