(...) Alzheimer ressemblait à une double peine ; un deuil qu'il fallait se préparer à vivre par deux fois. La maladie, disait-elle, vous retire d'abord tout ce qui fait d'une personne qu'elle est unique à vos yeux. En lui volant sa mémoire, elle brise cette douce complicité qui vous unit, parce que l'amour repose toujours sur une passerelle invisible, une passerelle édifiée par les souvenirs. Elle dépouille alors le cœur du malade de tous ces instants magiques pour ne laisser aux yeux des proches qu'une enveloppe vide (...) Après avoir grignoté l'esprit avec perversité, elle vend le corps comme un vulgaire morceau de viande à son amie la faucheuse.