FAILLE
Extrait 4
Je celui qui passe
les abrupts, les ressauts
les dalles et les arêtes
À la croisée des failles
sur les traces de pierre
ivre du battement de mon cœur
dans le souffle du temps
Là où creuse le vent
Là où creuse le vent
La pierre est nue
Sous le sable sous la mer
Sous les vagues du désir
La pierre ronde de ses milliers d’années
Là où creuse le vent
Dans le nœud des racines anciennes
S’ancre la forêt d’écorces rouges
Sous le repli des roches
L’eau chante en heures bleues
Là où creuse le vent
Où mon regard se perd
Le temps se souvient
Dans un rayon de soleil
Des poussières d’hommes passent
N’importe où
N’importe où Elle écrit
Sur les feuilles qui murmurent dans le vent
elle écrit à la sève des arbres
le chant des oiseaux
Elle écrit des lettres avec le plein des rochers
et le délié des hautes herbes
Elle écrit à l’encre des nuages
en blanc et noir
Elle écrit des mots de plumes et de fleurs
des mots qui rient qui parlent d’amour
des mots d’enfance
des mots de tous les jours
Puis elle signe d’une main d’eau et de terre
les sentiers dans la forêt
le versant des montagnes à l’odeur de soleil
N’importe où
Elle écrit la vie
FAILLE
Extrait 2
Leurs flancs gris portent les traces
de cicatrices anciennes
et leurs mufles sans âge
striées de fissures
de crevasses
racontent les ruptures primitives
de la terre et des rocs
Je suis celui qui marche
dans le temps arrêté
auprès de la montagne
où les troupeaux impassibles
boivent à même le ciel
la brûlure de l’été
FAILLE
Extrait 3
Je suis celui qui passe
à travers la montagne
déchiffrant dans la roche
les signes originels
de blanc, de noir et d’ocre
C’est l’heure où le corps s’unit au rocher
où les doigts se lient à la pierre
Les pieds se posent en arabesques
s’élèvent en lignes lentes en courbes fugitives
Les mains lissent les rondeurs tièdes
effleurent les creux les pointes
et glissent dans les fissures humides et fraîches
Elles cherchent à tâtons le chemin des failles
qui montent vers les crêtes
Laisse-moi
Laisse-moi
J’ai des vagues de haine
au bord de mes paupières
Des flux de mots amers
en houle de silence
Laisse-moi
Dans l’écume de sang
où chavire ma vie
Dans le ressac lancinant
qui gémit dans ma tête
Laisse-moi
Sur le sable de l’absence
se sont brisés mes coquillages
Et les poisons des grandes eaux
ont fermé leurs écailles
FAILLE
Extrait 1
Je suis celui qui marche
vers les sommets
à l’heure tremblée de midi
quand les chiens de soleil
dévorent la montagne
et que le regard se tait
entre les paupières épuisées de lumière
C’es l’heure où émergeant de la brume
d’étranges animaux
se couchent à l’horizon
têtes et corps emmêlés
frémissements de croupes et de dos