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Citation de art-bsurde


Pour Georges Bataille le sadisme ne doit pas être compris au sens de pathologie sexuelle mais plutôt de psychologie existentielle, et sous cet angle-ci il se profile comme négation radicale de l'autre, comme refus d'en reconnaître à la fois le principe social et le principe de réalité. Un monde où triomphent le martyre, la destruction et la mort ne peut subsister, c'est évident. Mais le sadique ne se soucie guère de la perpétuation du monde. Au contraire : il veut abolir le monde, et par la négation de son prochain, qui pour lui aussi est « l'enfer » dans un sens bien particulier, il veut réaliser sa propre souveraineté totale. Le prochain est réduit à l'état de corps, de chair, processus par lequel il se retrouve déjà au bord du gouffre de la mort ; et dans le pire des cas il finit par basculer par dessus la frontière létale dans le néant. De la sorte le tortionnaire assassin réalise sa propre corporalité meurtrière mais sans qu'il lui faille s'y perdre totalement comme le supplicié : il peut mettre un terme au supplice comme bon lui semble. Le cri de douleur et le cri de mort poussés par l'autre lui appartiennent, il règne en maître absolu sur la chair et l'esprit, la vie et la mort. De la sorte la torture opère un renversement total du monde social où nous ne pouvons vivre que si nous accordons la vie au prochain, refrénant le désir d’expansion de notre Moi, et allégeons ses souffrances. Au contraire de l'univers de la torture où l'homme n'existe que du fait même qu'il brise l'autre et peut contempler sa ruine. Une simple petite pression de la main prolongée par son instrument suffit pour transformer l'autre – y compris sa tête qui peut abriter ou non Kant et Hegel et toutes les neuf symphonies et le monde comme volonté et comme représentation – en goret qui s'égosille sur le chemin de l'abattoir. Le bourreau peut même, quand c'est finit, quand il a réalisé son expansion dans le corps d'autrui et a éteint ce qui était l'esprit de l'autre, il peut même se mettre à fumer une cigarette ou prendre son petit-déjeuner ou, s'il en a l'envie, retourner au monde comme volonté et comme représentation.
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