Bientôt l’hiver
Bientôt l’hiver
fastes et douleurs
Se pressent aux frontières
le temps s’enterre
la rivière
perd son chant
se désœuvre
mélopée souterraine
des eaux désenchantées
ondoiement de l’oubli
dans la vallée des herbes
et quelques voix indémêlées
issues
de cet inextricable
d’où surgit soudain
la mémoire du perdu
J’écris un lai d’ombre et de feu
parle d’un pays où la neige
clouée aux portes des légendes
se souvient
j’écris un lai d’aile et d’essor
mais les oiseaux du temps qui passe
me lègueront-ils une trace
pour demain
j’écris un lai d’eau et de vent
à peine un frémissement d’être
sur les années qui ont creusé
tant d’escales
j’écris un lai d’aube et de sel
pour qu’aux marches de souvenance
demeure l’innommé du signe
et du temps
La chouette
La chouette
trace un songe
vol tranquille
et blanc
elle chuchote un nom
tout contre l’écorce
des solitudes
sait parler aux
brouillards
au soir venant
se feutre son cri
l’étrave de la nuit
plonge dans la béance
indécise
d’un jour sans visage
la chouette verse
une larme de verre
sur le mystère de l’obscur
extrait 2
Chemins archaïques
où le secret
efface nos empreintes
comme l'eau
en errance blanche
jusqu'au tourbillon
premier
le secret
quelques mots calcinés
sur la route du taire
quelques songes disjoints
arpentant le temps d'être
le secret
seul aux franges
de l'illimité
extrait
À tous les silences
que nous ne savons pas
je lègue
des chemins distordus
des étreintes anciennes
merci
aux brindilles et aux pierres
aux fantômes qui nous invoquent
et aussi à l’océan
demeure impavide
le mystère
il y aura toujours
ce tremblement d’oubli
dans la nuit incertaine
l’horizon narrera
le même rêve
déchiré aux épines de l’aube
peu importe les augures
tout se tient là
sur le chemin des chansons grises
extrait 1
Ils ouvrent
le silence de leurs corps
à celui du monde
entre eux glisse
l'envers des signes
et les élytres incendiés des nuits
marbrées de vertiges
eaux brûlantes
noces noires
avec l'éclair
ils ont des gestes d'aromates
pour toucher
la tunique du manque
chercher
par quoi commence
l'oubli
Rives de nulle part…
Rives de nulle part
auxquelles nous touchons
après tant
d'improbables voyages
comment vous dire
comme si le blanc
montait sur la page
jusqu'à la noyer
de silence.
AILLEURS TROUVENT REFUGE …
Extrait 3
Ailleurs trouvent refuge nos bienveillances recrues de
siècles, nos défaites nettoyeuses d’effigies. Pour moi qui suis
de l’autre rive, le dit de l’eau y est fable aux lèvres lentes. On y
échange une grappe, une ombre, une amnésie, quelques gestes
fantômes arqués sur nos sommeils.
Protégé par la pellicule invisible du songe, reprendre sans
se retourner le chant pérenne des origines et des exils.
AILLEURS MES FOULÉES SE TAISENT EN CADENCE …
Extrait 2
Ailleurs, mes foulées se taisent en cadence sur les prairies
tourbeuses et les feuilles d’oubli. Il neige des légendes et des
vaisseaux brûlés. Sous l’emprise du soir, le long coulis des
vagues grises. Dans la nuit illimitée, le pas forcé des
nostalgies. Envie de faire halte pour peindre le vent, pas les
herbes qu’il couche ou les branches qu’il brise, juste en lui sa
nudité sauvage. Peut-être faudrait-il faire l’offrande d’une
ellébore pour pouvoir tracer son nom secret, comme il faut le
rire des ponts pour étancher la soif des fleuves.
…
AILLEURS EST UNE ÉCLAIRCIE QUE JE CULTIVE…
Extrait 1
Ailleurs est une éclaircie que je cultive. J’aimerais y
donner couleur à des paysages de perte, dans le doux
épuisement de lieux désaccordés. Escorté par un feu glacé
rendant mes empreintes habitables.
…