Un lac.
C’est comme écrire « un homme ». Ça ne veut rien dire au fond. Ça ne le peut pas. Un tout petit mot unique pour désigner des mondes imbriqués, vastes, complexes. En surface, les lacs sont comme nous. Paisibles, ils réfléchissent. Tourmentés, ils deviennent obscurs. Leur âme se trouve en profondeur, secrète, silencieuse… Les lacs sont des poupées russes en apnée. Des miroirs d’Alice.
Toutes sortes d’êtres peuplent les eaux noires. Des tout petits qu’on ne voit pas mais qui sont partout, par millions. Quand on plonge au bout du quai, on plonge dans plus d’animaux que d’eau. Des moins petits, qui habitent sur les rochers et qui dansent au gré des mouvements de l’eau comme des guerriers drogués dans des rites shamaniques. Des colonies entières qui dessinent sur les parois des rochers des géoglyphes occultes. Mais aussi des monstres silencieux et rusés, des choses qui vous regardent quand vous vous mirez sur la surface. Qui ondulent juste là sous votre image inversée, et qui se nourrissent de cette partie de votre âme cachée derrière le bouclier de votre peur. Des choses impossibles qui remontent parfois des abysses pour frôler les jambes des nageurs surpris.
Les lacs se cachent en eux-mêmes, en pleine vue, déguisés sous les habits de notre ignorance, des sans-abris qu’on ne regarde jamais en pleine face. Sous des allures d’évidences, ils sont des bols plus remplis de mystères que d’eau.
Pour qui trouve le courage de s’y abreuver, ils peuvent réparer ce qui fut brisé, altéré.
Ils peuvent désaltérer.
Et dedans, il y a aussi des poissons.
Ferme-Neuve
Laissez-lui le temps
Celui des châteaux de sable et des cabanes dans les arbres
Ce ne sont pas que des jeux
Ce sont plus que des rêves
Ils seront à jamais les refuges de son âme