Un coup de coeur. Une joie, un ravissement.
À tous les 12 août je participe à la journée "J'achète un livre québécois". Parmi mes choix pour cette journée de l'été dernier, j'ai acheté Seize Îles qui venait tout juste de paraître. Un premier livre pour cet auteur. Je savais qu'il s'agissait d'histoires de plongées. Je ne fais pas de plongée et l'idée de m'immerger dans les eaux noires d'un lac ne me sourit guère. Mais la curiosité de connaître cet univers l'a emporté sur ma froide indifférence. Oh, que j'ai bien fait !
Il s'agit donc de récits de divers moments de plongée, tous dans les eaux du Lac des Seize Îles. L'auteur nous fait découvrir un univers insoupçonné avec une écriture sensible, voire poétique. Il nous partage ses pensées et émotions de telle sorte que c'était comme si j'étais là, moi aussi, au fond de ce lac à en découvrir les trésors que recèlent ces eaux noires et froides. le tout avec respect et une grande humilité.
Décidément, c'est une des lectures qui m'a le plus plu ces dernières années. J'attends avec impatience son prochain livre, car j'ai appris qu'il travaille sur une nouvelle série de récits.
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Le lecteur qui s’intéresse aux questions touchant le territoire ou la fragilité de la nature y trouvera des réflexions pertinentes sur ces sujets. Voilà une voix assumée : celle d’un homme curieux qui a envie de se raconter par nos cours d’eau.
Lire la critique sur le site : LActualite
Un lac.
C’est comme écrire « un homme ». Ça ne veut rien dire au fond. Ça ne le peut pas. Un tout petit mot unique pour désigner des mondes imbriqués, vastes, complexes. En surface, les lacs sont comme nous. Paisibles, ils réfléchissent. Tourmentés, ils deviennent obscurs. Leur âme se trouve en profondeur, secrète, silencieuse… Les lacs sont des poupées russes en apnée. Des miroirs d’Alice.
Toutes sortes d’êtres peuplent les eaux noires. Des tout petits qu’on ne voit pas mais qui sont partout, par millions. Quand on plonge au bout du quai, on plonge dans plus d’animaux que d’eau. Des moins petits, qui habitent sur les rochers et qui dansent au gré des mouvements de l’eau comme des guerriers drogués dans des rites shamaniques. Des colonies entières qui dessinent sur les parois des rochers des géoglyphes occultes. Mais aussi des monstres silencieux et rusés, des choses qui vous regardent quand vous vous mirez sur la surface. Qui ondulent juste là sous votre image inversée, et qui se nourrissent de cette partie de votre âme cachée derrière le bouclier de votre peur. Des choses impossibles qui remontent parfois des abysses pour frôler les jambes des nageurs surpris.
Les lacs se cachent en eux-mêmes, en pleine vue, déguisés sous les habits de notre ignorance, des sans-abris qu’on ne regarde jamais en pleine face. Sous des allures d’évidences, ils sont des bols plus remplis de mystères que d’eau.
Pour qui trouve le courage de s’y abreuver, ils peuvent réparer ce qui fut brisé, altéré.
Ils peuvent désaltérer.
Et dedans, il y a aussi des poissons.