Jean-Louis Fournier

- Moi, je fais du miel. Toi, tu ne sais rien faire de bon. Tu sais seulement piquer, dit l’abeille à la guêpe.
- Je pourrais faire du miel si je voulais, mais je n’ai pas envie d’être une ouvrière comme toi. Travailler en usine dans l’agroalimentaire, merci, très peu pour moi !
- En attendant, tu es inutile.
- Pas du tout, je pollinise, mais seulement quand j’ai envie. Je suis pas une esclave à la botte de sa reine. Je suis indépendante et libre !
- Tu es bien obligé d’acheter notre miel.
- Pas du tout. Je fais mon miel moi-même, seulement pour ma consommation personnelle, du miel artisanal, du miel artisanal, du miel de guêpes.
- Quel culot ! Tu mens, la guêpe. Tu n’as pas honte ?
- Oui, je m’en et j’ai honte.
La guêpe se met à pleurer :
- Personne ne m’aime.
L’abeille est toute émue :
- Ne te laisse pas aller, on va t’aider. Viens faire un stage dans la ruche, on t’apprendra à faire du miel.
- Je ne pourrai jamais, même avec de la bonne volonté. Nous, les guêpes on est pas bâties pareil. Il nous manque une turbine à miel à l’intérieur.
- Tu n’as jamais pensé à te faire modifier génétiquement ?
- Ça me fait peur, je n’ai pas envie de grossir.
- Tu resteras la même, c’est seulement l’intérieur qui sera changé.
- Tu me le promets ? Parce que, excuse-moi de te dire ça, mais je ne voudrais pas devenir boulotte comme toi.
- Ne t’inquiète pas, tu garderas ta taille de guêpe.