Jean-Marie Blas de Roblès

La réunion eut lieu dans une grande villa provençale avec piscine et court de tennis. Maroilles avait bien fait les choses, le gratin des notables de la région était présent. On félicita le nouveau venu, on le choya et on l’adopta. Il fallait qu’il participe au prochain tournoi dans leur équipe, le tennis restait à sa disposition pour lui et ses enfants et ce serait un honneur de l’accueillir au Rotary ou au Lions Club, quel plaisir, vraiment, de rencontrer un jeune chirurgien aussi brillant ! Une évaporée n’avait cessé de lui faire du gringue tout au long de la soirée : ma mère s’était tellement tordu le cou pour surveiller son mari, qu’en montant dans la voiture elle souffrait d’un torticolis qui l’empêchait de redresser la tête.
- Méfie-toi de ces gens-là, s’était-elle contentée de dire à Manuel, le visage bizarrement incliné vers lui. Je ne les aime pas.
Mais comme l’a sans doute proféré un jour quelque vieux sage bantou, il est long le chemin entre la voix de la femme et l’oreille de l’homme : mon père mis sa réaction sur le compte de la jalousie et de son embarras dans ce genre de société. La chance avait tourné, il le sentait. Une nouvelle vie s’ouvrait à eux.
Il lui fallut plusieurs semaines pour s’apercevoir de certains détails qui ne cadraient pas avec l’idée qu’il s’était fait de Maroilles.