Sans doute, afin d’excuser le peu de goût des Français pour la géographie, pourrait-on dire que cela confère du mystère à leur voyages, même en terres banales. Parfois, cependant, la confusion est telle qu’il faut donner quelques " instructions " aux partants.
Marseille, la seule grande cité de France où, en cette fin de XXe siècle le mot peuple a toujours un sens, une consistance.
Lors de son mémorable voyage en Israël, sous les yeux de la planète entière, le président de la République arabe d’Égypte arbora, le 20 novembre 1977, au cours d’un dîner officiel avec le Premier ministre Menahem Begin, à l’hôtel King David à Jérusalem, une cravate dont les dessins formaient nettement des croix gammées. L’émotion, la foule, les larmes, les embrassades empêchèrent la plupart de relever ce détail ; la solennité de l’heure, la crainte de l’incongruité firent taire ceux qui le notèrent. Certains avaient vu, dans le motif de la cravate de Sadate, un ultime clin d’œil, un adieu audacieux à son « antijuivisme »… Ce n’était peut-être que l’œuvre d’un valet de chambre maladroit. On a de toute façon des preuves plus tangibles de ce travers du raïs, la plus célèbre, la plus irréfragable étant sa « lettre à Hitler » publiée sous sa signature le 18 septembre 1953 dans l’hebdomadaire gouvernemental cairote El-Moussaouar (L’Illustré), alors qu’il était déjà l’une des figures les plus en vue de l’équipe nassérienne au pouvoir au Caire. Cette « missive » au Führer avait été demandée à Sadate au moment où le bruit courait, abondamment répercuté par les agences de presse occidentales, que le dictateur nazi était encore en vie.
« Mon cher Hitler,
Je vous félicite du fond du cœur. Même s’il vous semble que vous avez été battu, en réalité vous êtes le vainqueur. Vous avez réussi en créant des dissensions entre le vieux Churchill et ses alliés, les fils de Satan. L’Allemagne vaincra car son existence est nécessaire à l’équilibre mondial. Elle renaître en dépit des puissances de l’Ouest et de l’Est. Il n’y aura pas de paix sans que l’Allemagne redevienne ce qu’elle a été. L’Ouest aussi bien que l’Est paieront pour cette réhabilitation, qu’ils le veuillent ou non. Les deux camps y consacreront beaucoup d’argent et d’efforts, dans le but d’avoir l’Allemagne de leur côté, ce qui bénéficiera grandement à celle-ci, aussi bien aujourd’hui qu’à l’avenir.
Pour le passé, je pense que vous avez commis quelques fautes, comme d’ouvrir trop de fronts et [de ne pas avoir su parer à] l’imprévoyance de Ribbentrop face à l’experte diplomatie britannique. Mais ayez confiance en votre pays, et votre peuple réparera ces faux pas. Vous pouvez être fier d’être devenu immortel en Allemagne. Nous ne serions pas surpris si vous y apparaissiez de nouveau ou si un nouvel Hitler se levait dans votre sillage. » (pp. 78-79)