Un petit nimbus rendu insignifiant par le rôle qu’on lui assigne sur le plateau de Pascal Praud. Est-ce que ce dernier sait au moins que son invité a signé un livre bien plus important que les sujets sociétaux qui se suivent en enfilade dans lesquels on l’enferme ? Je ne vaudrais pas faire injure à la vedette de Cnews, mais est-ce que ce dernier au moins a commencé par lire le livre de son chroniqueur : Joaquim Le Floch- Imad « Tolstoi, une vie philosophique » qui force le respect. Écrire à 26 ans pareille étude aussi brillamment menée vaut bien une messe dépassant le cadre de l’émission !
Dans ce texte jamais achevé et purement négatif, Tolstoi se livre à un requisitoire féroce contre l’armée russe et contre la guerre :
Nous n’avons pas d’armée, mais une foule d’esclaves abrutis de discipline, soumis aux ordres des voleurs et des marchands d’hommes. Cette foule ne constitue pas une armée parce qu’il n’y a en elle ni attachement réel à la foi, au Tsar et à la patrie - mots dont on a tellement abusé !-, ni courage chevaleresque, ni dignité militaire. Il y a, en tout et pur tout, d’un coté la patience et le mécontentement refoulé, de l’autre, la cruauté, l’asservissement et la concussion. (Page 54)
Tolstoï invite ainsi chaque individu à rejoindre ce combat par la destruction du pouvoir, dans le rejet des principaux fondements de l’ordre social : l’Etat et son service, l’impôt direct comme indirect, l’exploitation d’autrui, l’industrie décrite comme une source de paupérisation, les villes et leur corruption, les artifices de la civilisation et les illusions de l’amour-propre. La plus indigne des instituions dont il convient de se libérer est selon l’écrivain le service militaire tant celui-ci enferme les hommes dans le règne de la violence et, en astreignant ceux-ci à une discipline totale, détruit leur indépendance d’esprit et leur conscience humaine. (Page 226)