Comme nous l'avons vu dans le chapitre 2, des captures d'écran envoyées en février 2019 au Washington Post ont révélé que des employés de l'ambassade de Chine à Ottawa avaient demandé à des étudiants d'ascendance chinoise de recueillir de l'information à propos d'une conférence de la militante Rukiye Turdush sur les droit des minorités ouïghoures de Chine prévue à l'Université McMaster de Hamilton, et de leur faire savoir si des ressortissants chinois avaient participé à l'organisation de l'activité.
En 2015, à la veille de la journée internationale des femmes, des policiers de Beijing, de Guangzhou et de Hangzhou arrêtent cinq jeunes femmes pour la simple raison qu'elles projettent de distribuer des autocollants ornés de messages contre le harcèlement sexuel dans les transports en commun. Malgré les appuis qu'elles recueilleront un peu partout dans le monde, les membres du "gang des cinq" passeront des mois en prison, où elles subiront des interrogatoires constants. Alors candidate à la présidence des États-Unis, Hillary Clinton qualifie le traitement infligé à ces militants d'"inexcusable".
La police chinoise dispose de pouvoirs très étendus qui lui permettront de détenir des suspects sans inculpation dans des prisons secrètes improvisées, pour des périodes allant jusqu'à six mois. Ce système orwellien porte le nom de "résidence surveillée dans un lieu désigné". Pour les familles des détenus, qui n'ont aucune idée de l'endroit où se trouvent leurs proches, l'attente est insoutenable.
Pendant beaucoup trop longtemps et par pur intérêt, les sociétés occidentales ont mal interprété ou carrément ignoré les gestes de Beijing. Au fil des décennies, cet aveuglement volontaire s'est mué en complicité dans la diplomatie toxique, les violations des droits de la personne et l'ingérence étrangère auxquelles se livre aujourd'hui.
Plusieurs lecteurs m'ont dit que mon essai les avait alertés sur le fiat que les méthodes de contrôle appliquées par l'État chinois (harcèlement, violence, détention arbitraires, etc.) peuvent traverser les frontière des citoyens de n'importe quel pays.