Citations de Julien Picquart (14)
Quand les homophobes appellent les homosexuels à plus de retenue, n'est-ce pas pour se préserver de la vision cauchemardesque de deux hommes ou de deux femmes qui s'embrassent ? Leur discours est fondamentalement motivé par l'intolérance : ils opposent une sexualité légitime qui aurait seule droit de cité à une autre, honteuse, qu'il faudrait limiter à la sphère privée. Il y a donc bien, toujours, une hiérarchisation qui vise à la stigmatisation de l'homosexualité.
Mais alors, que doivent faire les homosexuels? S'ils n'ont pas d'enfant, on les accuse de participer à l'extinction de l'espèce humaine; s'ils en ont, on prédit la fin des haricots. Sans enfant, les homosexuels sont des égoïstes qui ne pensent qu'à eux, faire la fête et s'acheter des fringues. Avec enfant, ils sont tout aussi égoïstes et se soucient aussi peu des autres, puisqu'ils osent réclamer le droit des parents...
A tous ceux qui répètent sans réfléchir des généralités sur le développement de l'enfant et de l'adolescent, on ne peut que conseiller d'aller à la rencontre d'enfants élevés par des homos ; ils verront d'eux-mêmes combien leurs théories ne valent pas le crédit qu'ils leur donnent.
Les lesbiennes se trouvent en fait au croisement de deux formes de refus qui empoisonnent notre société : l'homophobie et le sexisme.
Les femmes hétérosexuelles comme les gays peuvent aussi être hostiles aux lesbiennes. Pourtant, a priori, les lesbiennes ont ce point commun avec les hétérosexuelles d'être des femmes. On pourrait en conclure (un peu vite) qu'elles sont des alliées objectives dans la lutte contre la domination masculine. De même, a priori, les lesbiennes ont ce point commun avec les gays d'être des homosexuels; on en déduirait volontiers qu'ils sont alliés dans la lutte contre la domination hétérosexuelle. Eh bien, non, pas toujours...Comme l'écrit l'historienne Florence Tamagne, "les représentations du lesbianisme sont marquées(...) par une double suspicion: de la part des féministes, qui l'interprétèrent parfois comme une négation du féminin, et par les homosexuels, qui construisaient leur identité sur le culte du pénis." (...) Finalement, les lesbiennes peuvent donc se retrouver rejetées, ou au moins critiquées, par les hommes et les autres femmes, par les hétéros et les gays, en somme par tout le monde.
Le mariage n'a pas à symboliser l'union des deux sexes, à hiérarchiser les sexualités ni à permettre de faire des enfants ; il a simplement pour fonction de marquer l'engagement de deux êtres l'un envers l'autre, quelle que soit leur orientation sexuelle.
Toute forme de rejet de l'Autre est à proscrire : reconnaître aujourd'hui que l'homophobie est aussi grave que le racisme, ce n'est pas enlever aux Juifs, aux Noirs, aux Maghrébins la reconnaissance de leurs souffrances passées et présentes ; ce n'est pas nier les spécificités de chacune de ces formes de rejet, c'est favoriser l'intégration de toutes et tous dans notre société. C'est cela la démocratie, le respect des droits de l'homme.
Notre société est hétérosexiste quand elle assure que l'hétérosexualité est supérieure à l'homosexualité, de la même façon que les hommes sont sexistes quand ils pensent être supérieurs aux femmes.
Etre homosexuel, c'est être victime d'homophobie. C'est cela avant tout autre chose - ce n'est peut-être même que cela.
En caricaturant les homosexuels, on s'épargne une réflexion sur les contraintes imposées par les genres et l'entrave à la liberté individuelle qu'ils peuvent constituer.
Beaucoup considèrent que la norme est ce qui permet à la société de rester soudée. Or, la réalité est plus complexe que cela et, dans l'histoire, les marginaux (rebelles, artistes...) ont parfois joué un rôle décisif dans l'évolution des sociétés.
Quand des années plus tard je me suis fait agresser avec mon amie, j'en ai parlé à l'une de mes sœurs, à mes amies. Mais surtout pas à mes parents ! J'ai voulu les épargner pour qu'ils ne soient pas toujours angoissés à l'idée d'avoir une fille lesbienne qui peut à tout moment être victime d'agression.
L'homophobie, c'est une forme d'intolérance, de rejet de l'autre parce qu'il est différent de la majorité des gens.
Mais il y a des effets qu'on ne peut pas éviter, des effets post-traumatiques au niveau psychologique. C'est tout ce qui est crises d'angoisse, cauchemars, mal de vivre, sentiments de mort, de haine de soi.