Kim Hortenson

Si certains désirs s’éveillent parfois au creux de mes reins, je les éteins vite d’une caresse synthétique. Pourquoi s’encombrer d’un mec alors qu’un canard en plastique le remplace si bien ? D’accord, mon volatile vibrant ne dialogue pas, mais ce n’est pas comme si ça le différenciait de la plupart des hommes, hein ? Devrais-je reprocher à mon jouet coquin son manque d’enthousiasme pour des loisirs communs ? Là encore, nombreux sont les gars qui partagent son désintérêt. Et puis des loisirs, je n’en ai pas. Les commérages entre copines sont ma seule fenêtre d’oxygène dans ma course hebdomadaire. Entre les emplettes, le ménage, le pédiatre, l’école, le boulot, je ne pourrais pas caser un hobby. Je ne suis pas magicienne.

Elle admira sa poitrine dans la glace. Plus jeune, elle avait souvent maudit ces deux excroissances qui refusaient de prendre la même générosité que celles de certaines de ses amies. Aujourd’hui, à trente-cinq ans, elle se félicitait d’avoir encore deux cônes optimistes alors que les seins de ces copines opulentes tombaient déjà vers le sol. Le temps avait peu modifié ses formes. Elle avait toujours été mince, ce qui l’enchantait, et petite, ce qui parfois la déprimait. Seuls ses tétons avaient quelque peu changé. Au lieu de pointer à l’horizontale comme autrefois, ils regardaient à présent un peu vers le haut. Ça ne la dérangeait pas. Elle trouvait même que ça s’accordait plutôt bien avec son nez retroussé.