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Citation de Charybde2


Son père s’attaquait aux travaux des champs comme s’il savait ce qu’il faisait, comme s’il avait payé quelque chose à quelqu’un à un moment donné et qu’il voulait maintenant récolter sous forme de rage la valeur de son argent. Il restait attaché à la charrue jusqu’au repas de midi et tout le long des après-midis froids, maudissant le cheval, maudissant le sol et maudissant le temps. Il essayait de ne pas lever les yeux de la terre pâle et pierreuse retournée par le soc pour ne pas voir le bois qui poussait le long de l’autre extrémité du champ. Il ignorait pourquoi on l’appelait le Bois de la Haine, mais le bosquet entourait la mare putride et il aurait fallu le défricher presque jusqu’à la route pour rentabiliser la terre, et c’était une tâche trop importante pour un homme seul, quelle que fût la rage qu’il y mettait. John Hawkins avait peu d’échanges avec ses voisins et parfois, il restait là, à contempler le bosquet sombre, attendant avec impatience le jour où Tom serait assez grand pour l’aider. Mais en cette année froide et maigre, il savait parfaitement qu’il ne tirerait aucun profit de son labeur, alors, avançant péniblement dans les sillons derrière son cheval, depuis le lever d’un soleil pâle et frais jusqu’à la tombée d’une ombre encore plus froide, jour après jour, il essayait de voir au-delà de cette année-là, au-delà de ce champ, pour imaginer un avenir plus prometteur et, comme il ne pouvait même pas entrevoir ne fût-ce que la lueur d’une telle espérance, il gardait simplement la tête basse et observait le sol pauvre se briser en vagues sous la lame de la charrue.
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