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Citation de Pgranchamp


Contrairement à aujourd'hui, les salaires ne sont, dans l'Europe préindustrielle, qu'un élément des revenus et nullement structurant tant ils peuvent varier. Globalement, ils sont calculés en fonction d'un « minimum vital » dans lequel la part de l'alimentation représente parfois plus des trois quarts de la somme considérée. Il en résulte que les maîtres cherchent à les diminuer quand le prix des denrées baisse. À Genève, le salaire est fixé par les autorités urbaines et elles ne manquent jamais de le diminuer quand la conjoncture est bonne. Le salaire varie aussi avec les saisons dans les métiers du bâtiment et de l'agriculture : les longues journées du printemps et de l'été valent quelques sols de plus qui cessent d'être versés dès que les jours raccourcissent. En outre, pour éviter de payer plus pendant la bonne saison, les employeurs diminuent les temps de repos ou suppriment un repas, allongeant d'autant la journée de travail. À Beauvais, quand le prix du pain double, triple ou quadruple, les employeurs baissent les salaires de 10 à 20 % pour compenser la cherté de la laine et le marasme du commerce, ce que les ouvriers acceptent plutôt que de souffrir le chômage. Cette volonté de payer les salaires les plus bas vient certes de la volonté des manufacturiers de maximiser le profit, comme Adam Smith l'avait relevé, mais elle s'appuie également sur un profond mépris habillé d'une condamnation morale des ouvriers : en 1754, Mayeuvre, le directeur de la chambre de commerce de Lyon, affirme qu'augmenter les salaires « C'est rendre l'ouvrier plus indépendant qu'il ne l'est déjà, le mettre à même de se faire surpayer la façon, lui fournir par là le moyen de se livrer à la débauche et de ralentir son travail ». Ce mépris, qui rejaillit directement sur le montant du salaire, est également visible dans la manière dont celui-ci est fixé pour les jeunes migrantes allant travailler dans l'industrie lyonnaise : la promesse de salaire a tendance à être plus élevée si c'est le père qui la présente que si c'est la mère veuve et cette différence est également à mettre en rapport avec les violences que les servantes subissent quand elles se présentent seules chez leur ancien maître pour réclamer leurs gages
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