Lou JB

À l’école, j’essayais toujours d’avoir les meilleures notes pour rendre mes parents fiers et je mettais tout en œuvre, pour être la plus populaire du bahut. À la maison, j’aidais ma mère dans les tâches ménagères pour avoir de la reconnaissance. En vain. Mes parents n’avaient toujours d’yeux que pour Lucie. Résultat, depuis de nombreuses années, je suis en froid avec ma sœur. C’est simple, elle et moi, on n’a jamais réussi à s’entendre. Ce n’est pas faute d’avoir essayé, mais c’était peine perdue. Nous sommes très différentes l’une de l’autre. Lucie est aussi brune que je suis blonde. Elle a les yeux marron alors que les miens sont vert émeraude. Et je suis plus grande qu’elle de quelques centimètres seulement. Mais il n’y a pas que du physique que vient notre différence, nos caractères sont tout simplement incompatibles.

On dit que les jumeaux partagent un lien particulier, nous en sommes la preuve vivante. Nous sommes extrêmement fusionnels, parfois même un peu trop. On pourrait croire qu’on partage le même cerveau, en fait, c’est la vérité. Autant l’admettre. Je sais toujours à quoi il pense, et vice versa. En plus d’être mon frère, il est également mon meilleur ami, mon confident et mon pilier. Je suis venue au monde la première, mais tels des inséparables, Noah me suivait de près, il a pointé le bout de son nez, vingt minutes après moi. Déjà dans la couveuse nous nous tenions la main et les choses n’ont pas tellement changé dix-neuf ans plus tard.

Je n’arrive plus à dormir, puisqu’à chaque fois que je ferme les yeux, c’est pour faire ce rêve de mes parents et mon frère à la plage ou pour revivre encore et encore l’accident. Ce qui est douloureux ce n’est pas de les voir et de pouvoir leur parler, non, ce qui l’est, c’est de me réveiller et de réaliser que tout ça n’était qu’une illusion. Alors la plupart du temps, je fixe le plafond et j’attends que le temps passe.

J’ai perdu beaucoup de poids et pas besoin de me regarder dans une glace pour le savoir, je le sens.

À cause d’une lecture passionnante qui m’a tenu en éveil jusqu’à quatre heures du matin, j’ai très peu dormi cette nuit. Du coup, le réveil est brutal. J’attrape mon iPhone sur la table de chevet et coupe le son. L’envie de gratter quelques minutes est alléchante, mais je dois me lever. Je n’ai pas le choix. Une longue journée m’attend et je dois être prête dans trente minutes. C’est donc encore à moitié endormie que je me lève pour me diriger vers la salle de bain attenante à ma chambre.

Elle ne fait pas ses quarante-sept ans, elle en fait facilement dix de moins et je ne dis pas cela parce qu’il s’agit de l’une des personnes que j’aime le plus au monde. Elle prend soin de son apparence, s’habille de façon très classe, se maquille uniquement pour cacher ses quelques rides, en ayant la main légère sur les couleurs et elle fait régulièrement des colorations pour repousser l’apparition des cheveux blancs. Elle est magnifique. Elle l’a toujours été.

Il y a tout ce que je déteste : des personnes qui ont oublié de se laver ce matin, et d’autres qui ont simplement oublié de mettre cette chose très pratique, que l’on appelle le déodorant. Je dois me faire violence pour ne pas taper les gens qui me bousculent comme s’ils ne me voyaient pas. Ce n’est pas parce que je ne mesure pas deux mètres qu’il faut me marcher dessus, quand même !

— C’est une habitude d’agresser les gens que tu ne connais pas ?
— Pour commencer, on n’a pas élevé les cochons ensemble, donc merci de continuer à me vouvoyer. Si j’avais un peu de temps à perdre, je vous apprendrais bien les politesses de base, mais... Vous savez quoi ? Laissez tomber ! Au final, vous êtes déjà en train de me faire perdre mon temps !

Il faut plus qu’une belle gueule pour me faire chavirer. En fait, aucun homme ne peut me faire craquer. Pas que je sois difficile, non, c’est juste que je n’ai jamais cherché à avoir une relation sérieuse. Le sexe, c’est ce qui me définit à vrai dire. Je ne veux que ça, sans les à-côtés futiles et ennuyants.

La patience n’est pas mon fort et malheureusement, ce n’est pas mon unique défaut. Tant d’autres s’ajoutent à la liste. D’ailleurs, je ne peux m’empêcher de pester contre le chauffeur qui ne roule pas assez vite à mon goût. Vu le prix de la course, il pourrait avoir l’amabilité d’accélérer un peu.

J’ai eu mon baccalauréat l’année dernière, et depuis, je suis un cursus pour devenir infirmière. Un métier qui me passionne, mais qui me prend aussi les trois quarts de mon temps. De longues études m’attendent et je n’ai pas de place pour le reste.