AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

4.25/5 (sur 14 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Lucien Marboeuf (pseudo) est plus connu sous le pseudo de "L'instit'humeurs". Il est professeur des écoles depuis près de 10 ans, et l'auteur de Vis ma vie d'instit. Les 101 histoires de ma classe, éd. Fayard.

Source : blog.francetvinfo.fr/l-instit-humeurs/about.html
Ajouter des informations
Bibliographie de Lucien Marboeuf   (1)Voir plus

étiquettes

Citations et extraits (2) Ajouter une citation
D'abord, je constate une fois de plus que chacun a un avis sur l'école, sur ses contenus les plus précis et sur la manière même d'aborder les apprentissages. Je ne sache pourtant pas qu'il existe un tronc commun universel en sciences de l'éducation et pédagogie !
Je suis toujours étonné de ce que je considère comme une forme de déni de professionnalisme, comme si notre savoir et notre savoir-faire étaient à ce point évidents qu'on pourrait leur opposer une "opinion".
Vais-je voir le boulanger pour lui conseiller telle levure, le maçon, tel ciment ? le pilote de l'avion pour lui proposer un plan de vol, l'ingénieur informatique pour lui suggérer tel protocole ?

Je comprends l'entraîneur sportif qui, après une semaine passée à étudier l'adversaire sur vidéo, à potasser les données biométriques de ses joueurs sur les huit dernières semaines, puis à mettre au point une stratégie, à composer une équipe en fonction de l'adversaire et des caractéristiques de ses joueurs, de mille autres choses que lui seul sait, le jour du match voit son expertise balayée par le premier supporteur qu'il croise et qui lui dit "il fallait mettre Tartempion à droite !".
..............................................................................................................................................................
D'une part, il arrive que, si on ne voit pas le sens d'une notion, la logique d'une étape, ce n'est pas forcément qu'elles n'en ont pas, c'est juste qu'on ne les voit pas.
D'autre part, si l'école doit évidemment préparer les élèves à un métier et leur donner les principales clés pour être opérationnels dans la société, elle doit aussi leur apporter bien plus que ce qui leur sera "utile", elle doit enrichir davantage que du "nécessaire" - sinon on peut se passer de littérature et se contenter de lire des recettes de cuisine ou des notices.
Commenter  J’apprécie          121
Je ne l’ai pas vu venir, tout détendu que j’étais, les poumons remplis de frais, une belle herbe verte et grasse sous le pied et un verre de coteaux-du-layon, ambré et vif, à la main. Il m’a demandé, comme on le fait dans ces cas-là, quand on se veut liant, ce que je faisais, bien sûr j’ai répondu instit, comme si je ne faisais que ça dans la vie, il m’aurait demandé ce que j’étais, je lui aurais répondu instit, comme si je n’étais que ça dans la vie – c’est fou l’importance sociale que peut avoir le métier.

Son air, ce quelque chose dans le regard quand j’ai dit instit, m’a mis comme un léger doute – un nuage sur les côtelettes d’agneau, comme un goût de bouchon dans mon layon. Il a pris une mine entendue.
« Instit… Je me trompe où ce n’est plus pareil qu’avant, le métier d’instit ? »
Dans ces cas-là, toujours laisser venir. De toute façon, j’avais la furieuse impression qu’il ne faisait que commencer.
« Je veux dire, de l’extérieur on a l’impression qu’il n’y a plus la même passion, dans ce métier, plus le même enthousiasme. Avant, les instits se donnaient corps et âme à leur travail, qui était tout pour eux, mais maintenant, il n’y a plus la vocation…
– Je n’en sais rien, lui ai-je répondu, je fais ce métier depuis une dizaine d’années, je ne peux donc pas comparer, et pour ce qui me concerne je n’ai jamais eu la vocation, en effet. Ce qui ne m’empêche pas d’aimer beaucoup ce que je fais, de le faire bien, je crois, et d’avoir ma vie à côté. »
Il a souri. Je commençais à entrevoir où il voulait m’amener, le bougre. Il a repris où il était, comme si je n’avais rien dit.
« Un exemple : la semaine dernière j’allais chercher mon fils à l’école, et devine qui je croise sur le chemin ? Son instit, dis donc ! J’ai regardé ma montre, il était 16 h 32, les gamins étaient encore à la porte de l’école et elle filait comme l’éclair ! Tu vois, ça me choque, personnellement. À mon avis, un instit d’avant n’aurait jamais fait ça. »
Les picotements, le long de ma colonne vertébrale. Il commençait à me chauffer, avec son instit en blouse grise.
« Écoute, j’ai dit, l’école termine à 16 h 30. Quand je dois aller chercher mon fils, je ne veux pas être en retard, alors à 16 h 32 je suis dans la rue moi aussi, histoire d’être à son école à lui pour 17 h 30. Je l’ai laissé à 7 h 30 au centre de loisirs et j’estime qu’après la journée de dix heures qu’il vient de s’enfiler, il a bien mérité que son père s’occupe un peu de lui, et de passer avant les enfants des autres, pour une fois.
– L’instit de mon fils n’a pas d’enfant…
– La maîtresse de ton gamin, tu la vois partir parce que tu es là à cette heure-là ! Mais tu es où quand elle part à 18 h 30 après deux heures de corrections ? À 20 h 30, après un conseil d’école ? Quand elle arrive à 7 h 45 pour rencontrer des parents ? Tu vois la partie émergée de l’iceberg et tu cries “un glaçon !” T’inquiète, va, elle les fait ses 35 heures, et même plus. »

Il a sorti sa vapoteuse, calmement. D’habitude ce truc me fait penser à un calumet de la paix, mais là, non, ça m’a plutôt paru l’inverse.
« À vous écouter, les profs, on dirait que vous bossez douze heures par jour. Il faut arrêter, en primaire vous avez 24 heures de boulot par semaine, trois ou quatre heures de correction en plus, deux semaines de vacances toutes les sept semaines et deux mois en été.
– Primo, c’est pas trois ou quatre heures, comme tu dis, c’est plutôt dix ou quinze heures de correction et de préparation, pour ce qui me concerne, et encore, ça, c’est maintenant, parce que je connais mon boulot, au début c’était beaucoup plus. Deuzio, les vacances, crois-moi qu’on les paie au prix fort, je donnerais volontiers quelques semaines pour qu’on arrête de me casser les bonbons avec ça dans un barbecue, par exemple. »

J’avais dû monter d’un ton sans m’en apercevoir, plusieurs convives nous regardaient, et j’ai croisé le regard de ma belle qui m’a interrogé silencieusement. Je lui ai fait mine de ne pas s’inquiéter, que tout allait bien, la preuve : je me suis resservi du layon. Cette discussion, je l’avais déjà eue plusieurs fois, sur les réseaux sociaux, dans des termes équivalents, ou avec des amis, sur un mode nettement plus compréhensif et constructif. Avec le temps, j’avais pris soin d’affûter mes lames.
L’autre idiot a repris, en changeant d’angle. J’aurais droit au catalogue complet.
Commenter  J’apprécie          110

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Auteurs proches de Lucien Marboeuf
Lecteurs de Lucien Marboeuf (24)Voir plus

Quiz Voir plus

portrait chinois, trouver cet auteur très connu (1)

S'il était un apéritif?

Martini gin
Champagne
Cocktail
Pastis

11 questions
104 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature française , poésie , théâtre , dessins , filmsCréer un quiz sur cet auteur
¤¤

{* *}