Madeleine Covas, "Seules les pierres le savaient"
Opération poches printemps: 6 nouveaux titres en poche, 2 achetés, le 3e offert!
Tous trois savaient qu’ils ne devraient pas parler de leur découverte jusqu’à ce qu’elle soit en sécurité. Ils avaient vu tant de sites pillés, tant d’objets volés sur les chantiers de fouilles que la crainte les envahissait.
Ces six mois, si difficiles à vivre, lui avaient donné un peu de temps pour réfléchir ; il avait revu tout son passé d’archéologue passionné, puis un peu désabusé. Finalement, il n’était pas mécontent de lui-même et, si les dernières semaines lui avaient semblé longues, il était devenu plus serein. Il avait pu mettre de l’ordre dans ses multiples notes destinées à un futur ouvrage sur les différents sanctuaires réservés au dieu Baal autour de la Méditerranée. Son travail lui avait paru plus avancé qu’il ne le pensait.
Elle aimait les fleurs ; c’était plus fort qu’elle, cet amour de la nature et des vieilles choses. Le départ de ses parents pour l’Amérique du Sud, la vente de la maison familiale, le renoncement à tous les petits objets de son enfance, à tous les souvenirs de son adolescence, lui avaient laissé comme une blessure qu’elle tentait d’enfouir en elle.
Il se remémora Abou Simbel avec plus de quarante-cinq degrés à l’ombre et une fatigue extrême qui enlevait à tous l’envie de travailler. Et quand arrivait le soir, après un superbe coucher de soleil sur le lac Nasser, on grelottait sous les tentes, et les nuits n’apportaient pas le repos si nécessaire.
Pour un néophyte, ces documents ne voulaient rien dire, mais au CNRS on ne s’y était pas trompé : quelque chose d’important se cachait sous la verdure, sous les fourrés inextricables, sous les vignes, et même sous le village actuel.