Au bout d'un long moment, elle se retrouva allongée face contre terre. Sous elle, le sol était doux et moelleux comme un oreiller de plume et son esprit vagabondait de-ci, de-là.
Comme elle restait prostrée, trop épuisée pour réagir, ses souvenirs et ses tourments se précipitèrent sur elle, se mirent à danser autour d'elle une ronde frénétique comme des busards attirés par la mort. Elle n'avait plus la force de dire : "Je penserai plus tard à maman, à papa, à Ashley, à toutes ces ruines... oui, plus tard, quand j'en aurai le courage." Elle n'en avait plus le courage mais, bon gré mal gré, elle y état ramenée. Les pensées traçaient des cercles autour d'elle, se rapprochaient, fonçaient, lui plantaient dans le cerveau des ongles et des becs cruels. Pendant un temps impossible à évaluer, elle demeura inerte, la face dans la poussière, exposée en plein soleil, à évoquer des choses et des gens qui avaient disparu, à se rappeler un genre de vie auquel il fallait renoncer à jamais, à envisager le sombre avenir qui déroulait devant elle de tristes perspectives.