J’écris assise sur le sofa…
J’écris assise sur le sofa
d’une maison qui déjà n’existe plus, je vois
par la fenêtre un paysage détruit lui aussi ;
je converse avec des voix
dont les bouches sont maintenant sous terre
et je le fais en compagnie
de quelqu’un qui s’en est allé pour toujours.
J’écris dans l’obscurité,
parmi des choses sans forme, comme la fumée qui ne revient pas,
comme le désir qui naît à peine,
comme un objet qui tombe visions de vide.
Mots sans destination
et que très probablement personne ne lira
comme une lettre renvoyée. Ainsi j’écris.
Doux mensonge…
Doux mensonge
Avant de découvrir que le beau chemin
n’est qu’une farce inutile,
un puits d’eaux mystérieuses
d’où nous avons tiré ce qui n’existe pas ;
avant que l’approche de l’ennui
ou la ruine du sourire n’apparaissent ;
avant que la frivolité
ne vienne se recoucher dans mon lit ;
avant que le désir ne se corrompe
ou les mots ou les rires,
laisse-moi te demander que le mensonge,
le doux mensonge d’être toi et moi dure
le vaste temps de cet instant.
Quand j’écris assise sur le sofa…
Quand j’écris assise sur le sofa
Semblable à l’image de mon visage dans le miroir,
sur la porte lisse et vernie d’une armoire
je me souviens de mon visage renvoyé par la lumière,
dans mes mots je cherche à entendre le son
des eaux stagnantes, troublées
de racines et de boue, que je porte en moi.
Non pas cela mais peut-être un souvenir :
revenir à l’un de ces jours-là
là où tout brillait, les fruits dans leur corbeille,
les après-midi de dimanche et le soleil encore ?
Le bruit des pas dans l’escalier
qui parvenait jusque dans mon lit dans la chambre obscure
comme sur un disque rayé je veux entendre mes mots.
Ou peut-être n’est-ce pas non plus cela :
seulement le frémissement de nos deux corps
se mouvant à tâtons pour survivre juste à l’instant.
…