À l'occasion de la 39ème édition du festival de Montreuil, Marie Pavlenko vous présente son ouvrage "Rita" aux éditions Flammarion Jeunesse.
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Note de musique : © mollat
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J’ai l’impression qu’un corps d’homme brisé, peut-être un relent des guerres, justement, est plus acceptable. Une blessure, ça fait warrior. Pour une femme, dans l’inconscient de plein de gens, la féminité écorchée est une monstruosité.
Je suis une orkla, sans foi ni loi, je connais ma place : celle que je prends, jamais celle qu’on me donne.
-Ok, je te suivais. Et après ? [...]
-Eh ben, t'arrêtes ! Tu arrêtes tout de suite de me suivre ! rétorquais-je.
-Impossible.
-Comment ça, impossible ?
-Je n'arrêterai pas de te suivre.
-Pourquoi ?
-Parce que. Je te suis. [...]
-Mais... Tu me suis ! Et tout va bien ?
Il resta silencieux, impassible.
-Nan, mais tu t'entends ?! brallai-je. Tu te rends compte de ce que tu me dis ? T'es un grand malade ou quoi ?
Lorsqu’Aurèle a repéré un trou dans un arbre, qu’il a gratté le tronc à la base, et qu’une tête ronde aux yeux jaunes en est sortie, Abi a failli pousser un cri. La chouette les a dévisagés, puis est retournée dans son antre. Ils se sont regardés, tous les six, avec la certitude d’avoir frôlé la Beauté.
J’ai un souvenir très net du choc ressenti lorsque j’ai déchiffré mon premier mot. TA-BLE. À l’instant précis où je l’ai lu en bégayant, une table a jailli dans ma tête. Cette table existait, et en même temps, n’existait pas.
Je croyais connaître le désert mais j’en découvre la complexité. Il est ocre, rouge, orangé, pâlot ou profond, il est illuminé par le soleil et terni par la nuit, il est bas, haut, plat, il est sablonneux ou couvert de caillasses, ses plis se resserrent pour former d’énormes collines, il se déchire, s’ouvre en deux, et de longues crevasses le nervurent avant de se refermer comme des plaies.
-Tu sais que j'ai une porte avec sonnette ?
-Ce que tu peux être rabat-joie parfois... soupira-t-il.
-Mais t'as quel âge ? lançais-je exaspérée.
-Ca dépend. On va dire 24 pour faire court.
- L'autre jour, mon père et ma mère étaient tout suintants d'attention l'un pour l'autre, à se faire des mamours, et ce matin mon père se balade avec sa maîtresse. Devant mon lycée ! Quelle plaie les parents, mais quelle plaie...
Ni Victor ni Jamal ne répondent.
Je relève la tête, abasourdie.
- Non ?
Victor jette un rapide coup d'oeil à Jamal et grignote l'intérieur de sa joue. Allons bon, qu'est-ce que j'ai encore dit ?
- Les miens sont morts il y a deux ans, m'éclaire Jamal d'une voix calme. Il ne se passe pas un jour sans que j'espère qu'ils soient encore avec moi pour me faire chier.
(p. 75)
L’humiliation est une seconde peau putride dont je n’arrive pas à me défaire.
Sachant que lui (B. Cendrars), il avait fait la guerre. De nombreux survivants étaient estropiés. Une jambe, deux jambes, un pied, une main, un bras… Sans parler des gueules cassées. En faisant des recherches sur Blaise, j’ai fini par tomber sur des photos. Faut s’accrocher. Une génération de Français a vécu en côtoyant ces corps cabossés et difformes, les trous dans la face, l’œil qui dégouline sur la joue à cause d’un obus qui t’a refait le portrait façon cubiste, les dents visibles de l’extérieur, la mâchoire de traviole, le crâne bosselé comme un terrain de motocross.